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**JEAN D'AMIEL, Recteur de Spolète** :
- Spolète c'est aussi la région d'Assise et de Trévi, en Italie; et c'est un des Etats du Pape durant des siècles. C'est au XVIème S. que les Etats Pontificaux (752 à 1780) atteindront leur taille maximum : Ils regrouperont alors sept provinces d'Italie (centre) dont Rome, la Marche d'Ancône à l'est et le Duché de Spolète au centre de la botte, sans compter bien sûr en France Avignon et le Comtat Venaissin. Car les papes vont auparavant, pendant plus des trois quarts du XIVème siècle, avoir leur siège en Avignon; une période fastueuse pour la ville et le Comtat qui vit la succession de papes français. Ces papes, originaires souvent du sud du pays eurent dans leurs affidés, entre autres de leur parentèle, des Amiel.
C'est dans ce cadre très général que, en raison de l'éloignement du pape de ses possessions italiennes, il lui fut nécessaire de déléguer ses pouvoirs seigneuriaux laïques à des fonctionnaires de la Curie dans tous les domaines du pouvoir; ainsi tout un cortège de proches purent alors occuper des charges très confortables. Jean d'Amiel, en italien Giovanni d'Amelio, fut un de ceux-là : Originaire du Quercy, de Sarlat selon certains, ou de Cahors car son frère Jacques est dit "damoiseau de Cahors", de Montamiel selon d'autres, Johannes de Amelio selon sa nomination en latin, Archidiacre de Fréjus, Clerc de la Chambre Apostolique, Nonce sera enfin Réformateur des Provinces et terres de l'Eglise Romaine en Italie; et il se fera appeler en français Jean d'Amiel de Cahors ! On le trouve d'abord Trésorier du Duché de Spolète entre 1317 & 1323, à cette date il grimpe dans la hiérarchie et devient Recteur du même Duché de 1323 à 1332; il sera ensuite effectivement Nonce Papal dans la même région et enfin l'Evêque de Spolète.
- Cette période est assez bien connue. C'était un temps de lutte entre les papes d'Avignon et les anti-papes qui leur disputaient la fonction (et les revenus fonciers de ces états italiens), ici Nicolas V. De sérieuses tensions agitaient alors le Duché : C'est la province charnière de l'Etat Pontifical alors; la ville de Spolète elle-même est 'toujours déchirée par des rebellions intestines' nous disent les historiens. D'Amiel y est nommé trésorier le 18 décembre 1317. Ces trésoreries italiennes devinrent en peu d'années un bon moyen de faire carrière pour les clercs d'origine modeste, peu leur importait la situation locale. Et c'est un fait que la plupart d'entre eux furent gratifiés en fin de mandat de canonicats et pas mal jouirent d'évolutions de carrière remarquable. Ce fut le cas de Jean d'Amiel comme on va le voir. On songea à prendre des précautions pour se garantir des troubles: La Curie Pontificale juge par exemple utile de posséder une résidence à l'extérieur de la ville dès le début des années 1320. Jean d'Amiel, alors toujours Trésorier, acquit pour ce faire soit Santa Maria Turrita, soit San Fortunato selon les auteurs, monastères de la région situés près mais en dehors de Montefalco et qui étaient à l'évêque de Spolète. Il fallut fortifier le lieu pour en faire un refuge mais aussi l'embellir pour en faire un véritable palais pour le Recteur (qu'il devint le 28 décembre 1323) entre 1322 & 1324. C'est en effet un architecte reconnu qui assura ces travaux en la personne de Lorenzo Maitani qui travaillait aussi à ce moment-là au Duomo d'Orvieto. La forteresse qui portera dès lors le nom de Montefalco était lancée, elle fut précocement le cadre d'une première conférence, en fait véritable Parlement du Duché dès 1324, alors que sa construction était encore en cours et que la Curie était sans doute basée provisoirement à Foligno. Le recteur Amiel était déjà pourvu de divers bénéfices : chanoine de Lichfield depuis décembre 1317, de Capdrot (diocèse de Sarlat !) depuis décembre 1318, puis d'Albi et de Sarlat même, il reçoit le titre d'archidiacre de Fréjus en 1323, avant de devenir enfin évêque de Spolète et d'en vivre (très bien) et longtemps !!
- Autre précaution, en 1327 le pape Jean XXII va ordonner à son 'viguier', le Recteur Jean d'Amiel de transférer son siège rectoral à Gualdo Tadino avec la consigne de sécuriser les communications entre le Duché et la Marche d'Ancône. Sur le chemin se trouvait une abbaye, celle de Sant'Eutizio, qui bien placée sur la route était de plus fortifiée (moins de travaux donc), elle fut confisquée par le recteur (confiscation approuvée par le pape). Jean d'Amiel eut de ce fait une nouvelle résidence (il demeurera recteur jusqu'en 1332). L'abbé de cette abbaye qui s'appelait Margarito (!) ne s'est pas toutefois laissé dépouiller ainsi; il s'est rendu en Avignon pour protester énergiquement aux pieds de Sa sainteté et il aurait apparemment 'convaincu' le Saint-Père, pourtant l'abbaye restera sous le contrôle des autorités locales laïques, en l'occurrence Jean d'Amiel.
- L'oeuvre de Jean d'Amiel est très présente à Montefalco : On sait qu'il a restauré les murailles défensives de la ville (disparues un siècle seulement après leur construction), notamment près de la Porte Agostino en 1328; il a surtout commandé et fait réaliser des fresques importantes entre 1330 & 1333 de la vie de Sainte Claire de Montefalco pour l'église dédiée à la sainte, fresques que l'on peut toujours admirer de nos jours et dont je me dois de vous donner la description en fin de ce dossier.
- Jean d'Amiel sa mission terminée reviendra en Avignon et occupera la charge de Notaire Apostolique dès le 12 février 1333, alors qu'il était déjà Clerc de la Chambre Apostolique, cela pour faciliter l'exercice de cette dernière fonction dont il fut pourvu peu avant. En cette qualité de Notaire Papal il fut notamment chargé de faire l'inventaire des Archives Pontificales (qui, déjà à cette époque devaient être assez volumineuses). Il s'occupera aussi de la Bibliothèque Pontificale. En Mai 1334 Jean XXII donne à son Nonce, Jean d'Amiel, le pouvoir de réconcilier, de négocier la paix à nouveau dans la Marche d'Ancône et dans la Romagne (cf. Reg. Vatican 117, f.235, lettre à Robert d'Anjou), paix sans cesse menacée.
- Une nouvelle mission papale l'appelle encore une fois dans le Duché en 1338 pour enquêter sur de nouveaux désordres; suite au départ du recteur Bertrand des Réaux devenu cardinal, la situation se dégradant à nouveau. Benoit XII successeur de Jean XXII mande sur les lieux son clerc de la Chambre devenu Archidiacre de Fréjus avec le titre de Nonce muni de pouvoirs spéciaux avec pour mission de rapporter en France toutes preuves des exactions commises à Assise sur les Archives Pontificales de ce lieu et en ramener certaines pièces. Jean Amiel arrive dans la ville mais entravé dans son travail d'expertise il parvient quand même à enquêter secrètement et put renseigner oralement le pape dès son retour en Avignon. Les sujets du St Siège dénoncèrent à Jean Amiel plusieurs recteurs dont celui de Spolète, Raymond des Pujols (un ariégeois ?) lesquels s'enrichissaient honteusement sur les biens de la Chambre Apostolique. Amiel vérifia ces dires, suspendit les inculpés de leur charge, désigna des remplaçants, opéra les restitutions à ceux qui avaient été pressurés. Pierre de Caunes (un audois ?) chargé de liquider cette affaire, rencontra le 15 Mars 1339 à Nice, Jean Amiel qui revenait à Avignon avec un lot de registres et documents; ils rejoignirent Avignon ensemble et la livraison de ces documents eut lieu le 30 Avril; décharge complète du contenu fut donnée à Jean Amiel après vérification, le 31 Octobre 1340 seulement!
- Satisfait de son travail Benoit XII l'envoya à nouveau en Italie, toujours comme Nonce avec le mandat de réformer en profondeur les abus commis dans les Etats Pontificaux, succédant de fait à Bertrand des Réaux. Pourvu d'un sauf-conduit le 5 Juin 1339, il se préoccupa surtout de réformer le Duché mais il y échoua, ne pouvant aller jusqu'à frapper la ville d'interdit. Benoit XII ne lui en tint pas rigueur : le 7 Décembre il le félicite d'avoir rétabli la concorde entre les habitants de Todi et le Duché. En 1340 il est encore l'objet de récriminations et doit venir s'en expliquer le 3 Juillet devant le pape, lequel semble avoir, malgré tout, mésestimé son action difficile sur place en raison de mauvaises informations sur celle-ci.
- Sa carrière se poursuivra sous Clément VI. Il équipe des bateaux pour la lutte contre les musulmans, est envoyé encore en Italie auprès des seigneurs lombards et des cités toscanes. Ses difficiles missions enfin terminées et en récompense de ses services en cet Etat Jean d'Amiel fut mitré par l'accession à l'épiscopat en 1348 comme évêque de Trente où il ne s'installera pas car dès 1349 il est transféré au siège de Spolète dès cette année-là et le restera jusqu'à sa mort en 1371; il eut sa résidence épiscopale à ce qu'il semble à l'Abbaye de Santo Stefano de Manciano, en dehors de la ville de Trévi, en 1363.
- La source principale de ces renseignements concernant l'état papal ducal du centre de l'Italie réside dans les Constitutions du Recteur Jean d'Amiel datées du 8 Janvier 1324 et conservées aux Archives Municipales de Foligno, et dans les "Lettres closes et patentes de Benoit XII" publiées par J.M. Vidal & G. Mollat, Paris, De Boccard, 1950. Vu aussi le "Dict. d'Hist. & de Géog. ecclésiastique" publié à Paris en 1914, T. II, col. 1251, pour la carrière de Jean Amiel.
**Les fresques de Jean d'Amiel à Montefalco**
C'est dans la Chapelle Ste Croix de l'Eglise Ste Claire (Santa Chiara de Montefalco) que l'on peut encore voir ces fresques. La chapelle est le seul élément conservé du XIVème S. dans l'église rebâtie au XVIIème S. Ces fresques, réalisées par deux maîtres inconnus (on reconnait en effet deux mains différentes) entre 1330 & 1333 représentent tout un cycle composé de deux volets distincts encadrant à gauche et à droite une crucifixion, le tout formant la chapelle. Le nom du commanditaire, celui du recteur, est indiqué par une inscription sous la fresque centrale. Celui que l'on a appelé le Premier Maître de Sta Chiara a laissé la Crucifixion sur le mur au-dessus de l'autel, les évangélistes peints sur les voûtes sur le mur droit des scènes de la vie de Ste Claire de M. et de St Blaise (dont la vision de Ste Claire concernant la Vierge et l'Enfant Jésus) ainsi que les fresques du Tabernacle représentant encore la Vierge et l'Enfant, avec les archanges Raphaël & Gabriel ainsi qu'une autre vision de la sainte, celle du Christ ressuscité ayant une croix implantée dans son coeur. Le Second Maître, lui, s'est consacré au mur gauche, oeuvre commandée aussi par Jean d'Amiel. On y voit en trois tableaux :
- La mort de Ste Claire dans laquelle on la voit se redresser sur son lit, entouré de la sollicitude des moines et moniales (elle fut en effet Abbesse du lieu de 1291 à sa mort et surtout une grande mystique, d'où la représentation de ses visions).
- Le martyre de Ste Catherine d'Alexandrie à sa droite.
- le Christ en Gloire avec les saints Blaise & Catherine au-dessus.
Il faut noter enfin la présence outre son nom, de la personne de Jean d'Amiel dans ces fresques par sa représentation en deux endroits (ce qui est une pratique courante alors en hommage et remerciement): on le voit s'agenouiller avec Ste Marie-Madeleine au pied de la Croix dans la Crucifixion et aussi en train d'honorer le Christ en Gloire, auquel il est humblement présenté par les saints de ce panneau Blaise & Catherine.
Un mot enfin sur un autre élément du temps de Jean d'Amiel qui, lui, a été déplacé : Il s'agit d'un retable long et bas appelé 'dossal' qui est attribué au premier Maître et commandé à lui par Jean d'Amiel vers 1333 pour ce qui était encore l'Eglise de Santa Croce (la Ste Croix). Cette oeuvre représentant encore une Crucifixion et les vies de St Blaise & Catherine, qui est documenté par les historiens en 1925, fut enlevé (suite peut-être aux Accords du Latran de 1929 qui réglèrent le sort des possessions de l'église sur l'Etat Italien) et envoyée au Vatican où elle se trouve toujours.
**Son frère Jacques Amiel** :
Jacques Amiel fut en vérité le 1er administrateur, on disait alors Maréchal, du Duché de Spolète, que l'on connaisse. Il assure ce poste alors que son frère Jean est encore au "rectorat", de 1323 à 1332. Le "damoiseau" de Cahors fut, dès 1320, un familier de son frère (qui serait donc plus âgé ?) lequel était en ce temps-là Trésorier du Duché; il remplit alors pour lui diverses missions auprès du pape à Avignon. La charge de Maréchal, militaire, fit qu'il eut un droit de regard sur les prisons ducales et fut amené à avoir, indirectement, des attributions judiciaires : ainsi il reçut souvent le montant d'amendes versées par les coupables selon les jugements et il saura l'utiliser, parfois, pour les dépenses de ses missions militaires.
(=> "L'administration pontificale dans le Duché de Spolète (1305-1352)" Ch. Reydellet-Guttinger; Ed. Olschki, 1975).
**Son frère Adhémar Amiel** :
Il sera, lui aussi, trésorier papal !
(=> le site internet du chapitre du diocèse de Fréjus-Toulon recoupe ces données).
- Spolète c'est aussi la région d'Assise et de Trévi, en Italie; et c'est un des Etats du Pape durant des siècles. C'est au XVIème S. que les Etats Pontificaux (752 à 1780) atteindront leur taille maximum : Ils regrouperont alors sept provinces d'Italie (centre) dont Rome, la Marche d'Ancône à l'est et le Duché de Spolète au centre de la botte, sans compter bien sûr en France Avignon et le Comtat Venaissin. Car les papes vont auparavant, pendant plus des trois quarts du XIVème siècle, avoir leur siège en Avignon; une période fastueuse pour la ville et le Comtat qui vit la succession de papes français. Ces papes, originaires souvent du sud du pays eurent dans leurs affidés, entre autres de leur parentèle, des Amiel.
C'est dans ce cadre très général que, en raison de l'éloignement du pape de ses possessions italiennes, il lui fut nécessaire de déléguer ses pouvoirs seigneuriaux laïques à des fonctionnaires de la Curie dans tous les domaines du pouvoir; ainsi tout un cortège de proches purent alors occuper des charges très confortables. Jean d'Amiel, en italien Giovanni d'Amelio, fut un de ceux-là : Originaire du Quercy, de Sarlat selon certains, ou de Cahors car son frère Jacques est dit "damoiseau de Cahors", de Montamiel selon d'autres, Johannes de Amelio selon sa nomination en latin, Archidiacre de Fréjus, Clerc de la Chambre Apostolique, Nonce sera enfin Réformateur des Provinces et terres de l'Eglise Romaine en Italie; et il se fera appeler en français Jean d'Amiel de Cahors ! On le trouve d'abord Trésorier du Duché de Spolète entre 1317 & 1323, à cette date il grimpe dans la hiérarchie et devient Recteur du même Duché de 1323 à 1332; il sera ensuite effectivement Nonce Papal dans la même région et enfin l'Evêque de Spolète.
- Cette période est assez bien connue. C'était un temps de lutte entre les papes d'Avignon et les anti-papes qui leur disputaient la fonction (et les revenus fonciers de ces états italiens), ici Nicolas V. De sérieuses tensions agitaient alors le Duché : C'est la province charnière de l'Etat Pontifical alors; la ville de Spolète elle-même est 'toujours déchirée par des rebellions intestines' nous disent les historiens. D'Amiel y est nommé trésorier le 18 décembre 1317. Ces trésoreries italiennes devinrent en peu d'années un bon moyen de faire carrière pour les clercs d'origine modeste, peu leur importait la situation locale. Et c'est un fait que la plupart d'entre eux furent gratifiés en fin de mandat de canonicats et pas mal jouirent d'évolutions de carrière remarquable. Ce fut le cas de Jean d'Amiel comme on va le voir. On songea à prendre des précautions pour se garantir des troubles: La Curie Pontificale juge par exemple utile de posséder une résidence à l'extérieur de la ville dès le début des années 1320. Jean d'Amiel, alors toujours Trésorier, acquit pour ce faire soit Santa Maria Turrita, soit San Fortunato selon les auteurs, monastères de la région situés près mais en dehors de Montefalco et qui étaient à l'évêque de Spolète. Il fallut fortifier le lieu pour en faire un refuge mais aussi l'embellir pour en faire un véritable palais pour le Recteur (qu'il devint le 28 décembre 1323) entre 1322 & 1324. C'est en effet un architecte reconnu qui assura ces travaux en la personne de Lorenzo Maitani qui travaillait aussi à ce moment-là au Duomo d'Orvieto. La forteresse qui portera dès lors le nom de Montefalco était lancée, elle fut précocement le cadre d'une première conférence, en fait véritable Parlement du Duché dès 1324, alors que sa construction était encore en cours et que la Curie était sans doute basée provisoirement à Foligno. Le recteur Amiel était déjà pourvu de divers bénéfices : chanoine de Lichfield depuis décembre 1317, de Capdrot (diocèse de Sarlat !) depuis décembre 1318, puis d'Albi et de Sarlat même, il reçoit le titre d'archidiacre de Fréjus en 1323, avant de devenir enfin évêque de Spolète et d'en vivre (très bien) et longtemps !!
- Autre précaution, en 1327 le pape Jean XXII va ordonner à son 'viguier', le Recteur Jean d'Amiel de transférer son siège rectoral à Gualdo Tadino avec la consigne de sécuriser les communications entre le Duché et la Marche d'Ancône. Sur le chemin se trouvait une abbaye, celle de Sant'Eutizio, qui bien placée sur la route était de plus fortifiée (moins de travaux donc), elle fut confisquée par le recteur (confiscation approuvée par le pape). Jean d'Amiel eut de ce fait une nouvelle résidence (il demeurera recteur jusqu'en 1332). L'abbé de cette abbaye qui s'appelait Margarito (!) ne s'est pas toutefois laissé dépouiller ainsi; il s'est rendu en Avignon pour protester énergiquement aux pieds de Sa sainteté et il aurait apparemment 'convaincu' le Saint-Père, pourtant l'abbaye restera sous le contrôle des autorités locales laïques, en l'occurrence Jean d'Amiel.
- L'oeuvre de Jean d'Amiel est très présente à Montefalco : On sait qu'il a restauré les murailles défensives de la ville (disparues un siècle seulement après leur construction), notamment près de la Porte Agostino en 1328; il a surtout commandé et fait réaliser des fresques importantes entre 1330 & 1333 de la vie de Sainte Claire de Montefalco pour l'église dédiée à la sainte, fresques que l'on peut toujours admirer de nos jours et dont je me dois de vous donner la description en fin de ce dossier.
- Jean d'Amiel sa mission terminée reviendra en Avignon et occupera la charge de Notaire Apostolique dès le 12 février 1333, alors qu'il était déjà Clerc de la Chambre Apostolique, cela pour faciliter l'exercice de cette dernière fonction dont il fut pourvu peu avant. En cette qualité de Notaire Papal il fut notamment chargé de faire l'inventaire des Archives Pontificales (qui, déjà à cette époque devaient être assez volumineuses). Il s'occupera aussi de la Bibliothèque Pontificale. En Mai 1334 Jean XXII donne à son Nonce, Jean d'Amiel, le pouvoir de réconcilier, de négocier la paix à nouveau dans la Marche d'Ancône et dans la Romagne (cf. Reg. Vatican 117, f.235, lettre à Robert d'Anjou), paix sans cesse menacée.
- Une nouvelle mission papale l'appelle encore une fois dans le Duché en 1338 pour enquêter sur de nouveaux désordres; suite au départ du recteur Bertrand des Réaux devenu cardinal, la situation se dégradant à nouveau. Benoit XII successeur de Jean XXII mande sur les lieux son clerc de la Chambre devenu Archidiacre de Fréjus avec le titre de Nonce muni de pouvoirs spéciaux avec pour mission de rapporter en France toutes preuves des exactions commises à Assise sur les Archives Pontificales de ce lieu et en ramener certaines pièces. Jean Amiel arrive dans la ville mais entravé dans son travail d'expertise il parvient quand même à enquêter secrètement et put renseigner oralement le pape dès son retour en Avignon. Les sujets du St Siège dénoncèrent à Jean Amiel plusieurs recteurs dont celui de Spolète, Raymond des Pujols (un ariégeois ?) lesquels s'enrichissaient honteusement sur les biens de la Chambre Apostolique. Amiel vérifia ces dires, suspendit les inculpés de leur charge, désigna des remplaçants, opéra les restitutions à ceux qui avaient été pressurés. Pierre de Caunes (un audois ?) chargé de liquider cette affaire, rencontra le 15 Mars 1339 à Nice, Jean Amiel qui revenait à Avignon avec un lot de registres et documents; ils rejoignirent Avignon ensemble et la livraison de ces documents eut lieu le 30 Avril; décharge complète du contenu fut donnée à Jean Amiel après vérification, le 31 Octobre 1340 seulement!
- Satisfait de son travail Benoit XII l'envoya à nouveau en Italie, toujours comme Nonce avec le mandat de réformer en profondeur les abus commis dans les Etats Pontificaux, succédant de fait à Bertrand des Réaux. Pourvu d'un sauf-conduit le 5 Juin 1339, il se préoccupa surtout de réformer le Duché mais il y échoua, ne pouvant aller jusqu'à frapper la ville d'interdit. Benoit XII ne lui en tint pas rigueur : le 7 Décembre il le félicite d'avoir rétabli la concorde entre les habitants de Todi et le Duché. En 1340 il est encore l'objet de récriminations et doit venir s'en expliquer le 3 Juillet devant le pape, lequel semble avoir, malgré tout, mésestimé son action difficile sur place en raison de mauvaises informations sur celle-ci.
- Sa carrière se poursuivra sous Clément VI. Il équipe des bateaux pour la lutte contre les musulmans, est envoyé encore en Italie auprès des seigneurs lombards et des cités toscanes. Ses difficiles missions enfin terminées et en récompense de ses services en cet Etat Jean d'Amiel fut mitré par l'accession à l'épiscopat en 1348 comme évêque de Trente où il ne s'installera pas car dès 1349 il est transféré au siège de Spolète dès cette année-là et le restera jusqu'à sa mort en 1371; il eut sa résidence épiscopale à ce qu'il semble à l'Abbaye de Santo Stefano de Manciano, en dehors de la ville de Trévi, en 1363.
- La source principale de ces renseignements concernant l'état papal ducal du centre de l'Italie réside dans les Constitutions du Recteur Jean d'Amiel datées du 8 Janvier 1324 et conservées aux Archives Municipales de Foligno, et dans les "Lettres closes et patentes de Benoit XII" publiées par J.M. Vidal & G. Mollat, Paris, De Boccard, 1950. Vu aussi le "Dict. d'Hist. & de Géog. ecclésiastique" publié à Paris en 1914, T. II, col. 1251, pour la carrière de Jean Amiel.
**Les fresques de Jean d'Amiel à Montefalco**
C'est dans la Chapelle Ste Croix de l'Eglise Ste Claire (Santa Chiara de Montefalco) que l'on peut encore voir ces fresques. La chapelle est le seul élément conservé du XIVème S. dans l'église rebâtie au XVIIème S. Ces fresques, réalisées par deux maîtres inconnus (on reconnait en effet deux mains différentes) entre 1330 & 1333 représentent tout un cycle composé de deux volets distincts encadrant à gauche et à droite une crucifixion, le tout formant la chapelle. Le nom du commanditaire, celui du recteur, est indiqué par une inscription sous la fresque centrale. Celui que l'on a appelé le Premier Maître de Sta Chiara a laissé la Crucifixion sur le mur au-dessus de l'autel, les évangélistes peints sur les voûtes sur le mur droit des scènes de la vie de Ste Claire de M. et de St Blaise (dont la vision de Ste Claire concernant la Vierge et l'Enfant Jésus) ainsi que les fresques du Tabernacle représentant encore la Vierge et l'Enfant, avec les archanges Raphaël & Gabriel ainsi qu'une autre vision de la sainte, celle du Christ ressuscité ayant une croix implantée dans son coeur. Le Second Maître, lui, s'est consacré au mur gauche, oeuvre commandée aussi par Jean d'Amiel. On y voit en trois tableaux :
- La mort de Ste Claire dans laquelle on la voit se redresser sur son lit, entouré de la sollicitude des moines et moniales (elle fut en effet Abbesse du lieu de 1291 à sa mort et surtout une grande mystique, d'où la représentation de ses visions).
- Le martyre de Ste Catherine d'Alexandrie à sa droite.
- le Christ en Gloire avec les saints Blaise & Catherine au-dessus.
Il faut noter enfin la présence outre son nom, de la personne de Jean d'Amiel dans ces fresques par sa représentation en deux endroits (ce qui est une pratique courante alors en hommage et remerciement): on le voit s'agenouiller avec Ste Marie-Madeleine au pied de la Croix dans la Crucifixion et aussi en train d'honorer le Christ en Gloire, auquel il est humblement présenté par les saints de ce panneau Blaise & Catherine.
Un mot enfin sur un autre élément du temps de Jean d'Amiel qui, lui, a été déplacé : Il s'agit d'un retable long et bas appelé 'dossal' qui est attribué au premier Maître et commandé à lui par Jean d'Amiel vers 1333 pour ce qui était encore l'Eglise de Santa Croce (la Ste Croix). Cette oeuvre représentant encore une Crucifixion et les vies de St Blaise & Catherine, qui est documenté par les historiens en 1925, fut enlevé (suite peut-être aux Accords du Latran de 1929 qui réglèrent le sort des possessions de l'église sur l'Etat Italien) et envoyée au Vatican où elle se trouve toujours.
**Son frère Jacques Amiel** :
Jacques Amiel fut en vérité le 1er administrateur, on disait alors Maréchal, du Duché de Spolète, que l'on connaisse. Il assure ce poste alors que son frère Jean est encore au "rectorat", de 1323 à 1332. Le "damoiseau" de Cahors fut, dès 1320, un familier de son frère (qui serait donc plus âgé ?) lequel était en ce temps-là Trésorier du Duché; il remplit alors pour lui diverses missions auprès du pape à Avignon. La charge de Maréchal, militaire, fit qu'il eut un droit de regard sur les prisons ducales et fut amené à avoir, indirectement, des attributions judiciaires : ainsi il reçut souvent le montant d'amendes versées par les coupables selon les jugements et il saura l'utiliser, parfois, pour les dépenses de ses missions militaires.
(=> "L'administration pontificale dans le Duché de Spolète (1305-1352)" Ch. Reydellet-Guttinger; Ed. Olschki, 1975).
**Son frère Adhémar Amiel** :
Il sera, lui aussi, trésorier papal !
(=> le site internet du chapitre du diocèse de Fréjus-Toulon recoupe ces données).