« Laisser un monument aere perennius, un ouvrage indestructible, qui fasse penser, sentir, rêver, à travers une suite de générations, cette gloire serait la seule qui me ferait envie … » rassurez-vous ce n’est pas de ma plume mais de celle du grand penseur et diariste qui fait encore la gloire de notre nom, Henri-Frédéric AMIEL, suisse de naissance, dont je vous ai sommairement donné un résumé de la vie au début de cette ‘saga’ amielienne. Cette volonté d’écrivain relatant dans ses dix-sept mille feuillets et quotidiennement, à travers son existence, ce qui a occupé son esprit autant que son coeur est exceptionnelle. Depuis les premières publications partielles et choisies données peu après sa mort et sur son désir, jusqu’aux modernes « blogs » de cet outil ‘magique’ qui me permet de m’adresser à vous, il ne se passe pas beaucoup de temps sans que l’on ne parle pas de ses écrits: Connu dans le monde entier et traduit régulièrement, son « Journal Intime » est analysé (y compris et surtout dans le sens psychologique voire psychiatrique), commenté et aujourd’hui entièrement édité; une nombre assez incroyable de phrases de ses pensées sont citées comme références; souvent d’une modernité étonnante son oeuvre révèle un homme qui n’a jamais menti sur l’état de son être profond suivant les étapes de son existence et l’état du monde de ce XIXème siècle qu’il a presque entièrement connu. Je ne pouvais pas trouver mieux pour introduire ce temps pas si lointain, c’est celui de nos aïeux les plus proches, c’est le siècle où tout commence à devenir possible, au moins dans les sociétés occidentales pour lesquelles la conjugaison de multiples facteurs va favoriser l’émergence très lente sans doute mais incontestable d’une vie meilleure pour ses membres. Bien entendu notre gloire gentilice moderne, Henri-Frédéric aura droit à de multiples articles, cela va de soi! Parcourons donc maintenant ce siècle riche de mouvements politiques, de progrès scientifiques, techniques, artistiques et donc sociaux à l’aune de ceux qui ont porté le nom Amiel et participé à cette vie foisonnante, continuant en l’amplifiant énormément le siècle précédent, celui des idées nouvelles et des premiers soubresauts de la modernité.
La démocratie se met en place par a-coups en Europe comme en Amérique. En France le Premier Empire d’abord va remettre la France debout en organisant le pays, quelques régimes des anciens temps vont bien essayer de restaurer l’état comme royaume ou comme empire mais plusieurs révolutions et une guerre courte mais avec envahissement du pays sonneront le glas définitif de l’Ancien Régime. Il aura fallu quand même un siècle pour installer définitivement la République. Pour ce domaine il y a lieu de citer la lignée de militaires et barons Ameil dont le premier Jean Joseph Gilbert Ameil (quelquefois noté Amiel dans les oeuvres d’histoire), Général de Brigade qui reçut de l’Empereur Napoléon Ier le titre de Baron, titre héréditaire toujours transmis de nos jours à ses descendants (Mme la Baronne Ameil a été citée par les journalistes dans l’affaire Bettencourt qui agite le milieu politique en ce moment). Ce siècle est aussi celui de Victor Hugo, qui fut aussi un homme politique, on connait son aversion des pouvoirs non élus, sa haine de Napoléon le Petit (nom qu’il donnait au neveu du Grand Napoléon, Napoléon III); il fut proscrit de son pays avec trente-cinq autres compagnons sur l’île de Jersey en 1853, parmi ces irréductibles figure Jean-Baptiste Amiel, dit Amiel de l’Ariège. Auparavant ce républicain convaincu fut déporté à Douera et après Jersey, en 1855, il fut envoyé en Irlande puis enfin en Angleterre. A la chute de l’Empire il put enfin rentrer en France et il s’occupera alors de construire des chemins de fer (il y avait alors fort à faire dans ce domaine). Je pourrais citer plusieurs autres forte-têtes de l’époque qui ont participé à cette émancipation progressive du pays mais je n’en ai pas le temps; notons encore que les communes ont eu de nombreux Amiel comme Maires, souvent d’ailleurs de la même famille (cela se vérifie pour d’autres patronymes) pour un même lieu; ainsi par exemple pour la commune de Lambert (04, rattachée en 1973 à celle de La Robine sur Galabre) où l’on trouve comme premier magistrat Jean-Joseph Amiel de 1814 à 1832, puis Jean-Batiste (sic) Amiel de 1880 à 1886, et Eloi Amiel de 1926 à 1935. Un autre famille Amiel notables d’Aurignac en Haute-Garonne est ainsi également connue, elle a d’ailleurs aussi donné un Préfet qui ajouta à son patronyme Amiel celui de Dabeaux, nom de son épouse d’une autre famille notable du même coin que celle de ses ancêtres. Un autre Préfet du nom d’Amiel est connu en la personne de Léon-RodolpheAmiel, parisien d’origine, né en 1848, qui a la particularité d’être comme Louis Amade (préfet et parolier du XXéme S) un préfet-poète dont nous reparlerons bien sûr. Un pays qui s’organise, un pays qui enseigne ses enfants, c’est aussi une grande nouveauté de ce siècle (même s’il y avait déjà un embryon d’enseignement souvent confessionnel); outre les instituteurs ou maîtres de pension comme Isidore Amiel à Paris (qui eut aussi des activités politiques et dont on reparlera un jour) une figure sort du lot, son fils, Emile Amiel qui fut un élève brillant du Lycée Bonaparte à Paris; originaire comme son père de Villemur-sur-Tarn (31) il devint Professeur de Lettres aux Universités puis reprit par nécessité la direction de l’entreprise de son beau-père, en Côte-d’Or, département dont il fut Conseiller Général (à compléter plus tard pour d’autres raisons). L’enseignement c’est aussi un réseau de lecture adaptée, c’est le développement de beaucoup de disciplines nouvelles et dans ce domaine je dois dire quelques mots sur un bibliothécaire érudit du nom de Louis Amiel; ayant commencé sa carrière dans l’administration locale, il fut Secrétaire en chef de la Mairie de Reims pour laquelle il a dressé les Tables des Archives Législatives et Administratives, puis en poste à Châlons il oeuvra pour le Comité des Travaux Historiques et Scientifiques; il y avait tout à découvrir, à étudier et à publier alors; on peut être étonné de nos jours sur l’immense travail de reconnaissance qui a été fait dans beaucoup de domaines de la connaissance: les érudits ne comptaient pas leur temps passé à fouiller, classer, recouper les informations, et pas seulement dans ces sciences humaines! En considérant les moyens qui étaient alors à leur disposition pour effectuer toutes ces tâches on ne peut que leur tirer le chapeau et relativiser avec nos moyens, informatiques notamment, d’autant plus qu’il faut ajouter à ces professionnels les amateurs et sans grade comme Firmin Amiel, fonctionnaire de l’Enregistrement (Impôts) qui était poète à ses heures (je vous en reparlerai); audois de naissance bien qu’ariégeois de coeur (surtout pendant son exil de fonctionnaire à Paris), il fit un travail d’ethnologie en collectant dans l’Aude les chansons populaires que l’on commençait aussi à répertorier. Tout ce travail effectué alors que la France sortait à peine de l’Ancien Régime est irremplaçable et précieux; je ne sais pas si ailleurs hors d’Europe ou même en Europe un tel volume et aussi divers ait été effectué; notre histoire est notre « plus » définitif et intouchable pour ce qui concerne plus de vingt siècles d’histoire à l’égal des vingt ou plus siècles précédents qui sont l’apanage des peuples de la Méditerranée.
J’ai commencé avec Henri-Frédéric, je terminerai avec lui ce premier article du XIXéme S. et pour rester dans ces dernières pensées, je citerai ces quatres vers de son « Hymne à Genève » sa ville natale:
« Descendez pour un jour des sphères éternelles, Penseurs, héros, martyrs, ancêtres glorieux, Soufflez en nous votre âme, et, déployant vos ailes, Emportez nos accents et nos coeurs vers les cieux ».
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