Dernier volet sur ce vaste sujet qui n’a pas la prétention d’être exhaustif mais comme toujours d’exciter la curiosité et donc l’intérêt, un peu comme lorsque l’on feuillette un livre après avoir été attiré par le titre et sa présentation et que l’on se met à lire plusieurs pages voire tout un chapitre et finalement à le lire entièrement.
J’ai déjà bien abordé cette période riche d’évènements, de découvertes, de nouveautés que fut la Renaissance dans toute l’Europe et pourtant j’y reviens encore car il y a un tel foisonnement notamment culturel, humaniste, religieux qu’il est difficile de ne pas y accorder encore quelques regards et vous donner quelques personnages supplémentaires. Comme Elio Quinzio Emiliano Cimbriaco (en latin Quinti Aemiliani Cimbriaci), pseudonyme un peu pompeux mais bien dans le goût de l’époque de Giovannni Stefano Emiliano, littérateur et poète de Vicenze (Italie) du XVème S. Il étudia l’humanisme, cette philosophie de son temps, toujours présente de nos jours puis partit dans le Frioul professer le latin. Il obtint des lauriers et fut sacré excellent poète en 1469 pour des vers louant l’Empereur Frédéric III de Saxe. En 1489 il va à Lintz, à la cour de l’Empereur germanique Maximilien Ier, y est couronné une deuxième fois pour une oeuvre dédicacée à ce monarque. Il reçoit très vite le titre de Comte Palatin. Dès 1490 il retourne dans sa patrie, à Cividade del Friuli où il rimera jusqu’à sa mort (cf « Notizie delle vite ed opere scritte da litterati del Friuli » t1 G.G. Liruti Venezia 1760 pp382.394).
Au XVIème S. il me faut encore dire quelques mots sur ce Paulus Aemilius Romanus (1510-1575) écrivain, éditeur, professeur d’hébreu à l’Université d’Ingolstadt; à son nom originel très hébreu il ajoutera Paul devant et le surnom de romain derrière. Il était en effet juif d’origine et c’est pour affirmer sa conversion catholique qu’il modifie ainsi son nom (je rappelle encore que ces façons de faire avec son nom étaient courantes depuis toujours sans doute pour mieux se fondre dans une société différente de celle de ses origines, on l’oublie trop de nos jours où les pratiques sont d’une teinte plus identitaire). Il épousera Anna Augsburger qui lui donnera dix-sept enfants! Il enseignera la langue de ses pères, l’hébreu à partir de 1547 dans cette Université bavaroise où il obtiendra par ailleurs un « Baccalauréat en médecine » selon l’épitaphe de sa tombe se trouvant dans l’église d’Ingolstadt.
Restons en Allemagne avec Georg Aemilius (1517-1569) né à Mansfeld, parent éloigné de Luther le grand réformateur protestant allemand; il étudie de 1532 à 1540 à Wittenberg, ville de Saxe-Anhalt où il formera avec quelques amis un cercle de poètes néo-latins; en 1540 il devient Recteur de l’Ecole de Grammaire de Siegen (Rhénanie du Nord) jusqu’en 1553 où il accède au poste de Premier Surintendant de Stolberg. Il va y rester jusqu’à sa mort en 1569. Il écrivit des cantiques en allemand, traduisit des chorals de Luther en latin et s’intéressa à la botanique. Aux Pays-Bas, l’autre pays de la Réforme, on peut dire un mot de Robert Aemilius, fils de Gérard, né en 1663, il fut d’abord prédicateur protestant puis directeur du Statën Collège de théologie de Leiden (Frise Occidentale) où il décèdera en 1729 après avoir écrit plusieurs ouvrages sur sa religion.
A la même époque en Italie vécut un certain Francesco de Aemiliis en italien de son vrai nom Giovanni Francesco Emili (encore un qui n’a pas hésité à profiter de l’illustre et antique nom romain en s’en réclamant très explicitement); on a de lui un ouvrage de mathématiques intitulé « Magnéticarum motionum investigatio … » publié à Parme en 1682.
Terminons avec ces personnages de la culture par un curieux personnage dont le nom véritable est Peter Zorn; il vécut au XVIIIème S. et eut plusieurs pseudonymes dont celui de Théophilus Amelius; né en 1682, mort en 1746 il fut tour à tour bibliothécaire, philologue, professeur de théologie protestante à Kiel (Allemagne); il enseigna aussi le grec et ‘les antiquités’, l’éloquence et l’histoire (!), et eût de plus une vie errante et agitée en Prusse et en Allemagne, en Pologne (!!). Tout le monde rendait justice à son vaste savoir ainsi qu’à sa probité mais son comportement inconstant et ‘mauvais joueur’ dans les joutes oratoires fut peu apprécié, d’autant plus qu’il avait un caractère irascible (!!!). On n’a conservé de lui que des dissertations, des opuscules en latin dans le texte, alors que l’époque était désormais plutôt le français, mais quand on revendique un tel pseudo on se doit d’y faire honneur, n’est-ce pas!
Ce qui suit est un peu un inventaire à la Prévert mais voyez-y plutôt un éventail de la vie quotidienne de nos ancêtres du nom d’Amiel qui vous montrera que notre nom fut véritablement celui aussi de gens très ordinaires.
Bernard Amiel, prieur de Valmoissine héritier et neveu d’Adhémar Amiel (proche de la papauté voir ailleurs) et son exécuteur testamentaire au XIIIèS.
Messire Pierre d’Amiel, seigneur de Rivals et Brucassel, bourgeois de Carcassonne qui eut un parent Jean Amiel, contrôleur des ports et passages au XVIIè S.
Jehan Amielle, procureur des manans (sic) de Corbie, près d’Amiens au milieu du XVème S.
Raymond Amiel, bourgeois d’Avignon qui est sollicité en 1267-68 par le sénéchal afin de frapper la monnaie du Comtat Venaissin (état papal en France); dans le même registre, Tarascon-sur-Ariège fut par contre un rendez-vous de faux-monnayeurs au début du XIVème S. dont Guillaume Amiel dit Mercier, marchand de cette ville fit partie.
Plus modestement, Villegly (Aude) eut une tuilerie dont le maître était Bernard Amiel à la fin du XIVème S. De même dans la vallée de l’Ysieux, en Ile-de-France fut connue la famille de Jacques Amiel, ‘compagnon pottier de terre’
Jean-Baptiste Amiel était au début du XVIIIème S. juge en la Châtellenie du Canal du Midi (à l’époque Canal Royal des Deux Mers) pour le département (secteur) de Béziers.
Je ne peux qu’indiquer ici les innombrables consuls de communautés, paysans, laboureurs, bourgeois, notaires, avocats, marchands, artisans etc…cités dans les répertoires d’archives départementales (témoins, rédacteurs, accusés ou défenseurs, reconnaissances, accords, ventes ou donations …) qui occupent tout ce millénaire de l’Ancien Régime…
Quelques curiosités toutefois comme cet Amiel des environs de Toulouse (on n’en sait pas plus sur son identité) qui fut miraculé grâce à ND de Rocamadour au XIIème S. dont le récit fut consigné dans la liste des miracles reconnus par cette intervention « De quodam ruente ab arbore » vol XII, XLIX; ou ces deux traîtres amieliens de Pamiers qui ont livré leur ville ariégeoise en 1486 à un envahisseur-brigand du nom de Narbonne: Fauro et Naudo Amielh; ou encore dans le même registre, Antoine Amiel, jeune déserteur qui comparait devant la Cour d’Assises de l’Aude en 1835 sous une triple accusation de vols avec effraction, qui a derrière lui déjà cinq condamnations et fut condamné cette fois à six mois de travaux forcés et à ‘l’exposition’. Mais nous sommes là au début du XIXème S., l’ancien régime s’il n’est pas encore totalement anéanti et fait subir au peuple encore quelques soubresauts monarchistes, souffle par là ses dernières fumeroles. De nouvelles idées nées de la Révolution se mettent peu à peu en place, il y aura plusieurs révolutions pour renverser ces derniers régimes assez autoritaires, dont un né du bonapartisme, et après presque trois quarts de siècle la République (IIIème) va enfin s’installer durablement en France. Mais c’est véritablement alors une autre époque qui n’a plus rien de commun avec le XVIIIème mort dans les larmes et le sang des révolutionnaires, clôturant cet Ancien Régime que l’immense majorité de la population ne regretta pas. c’est une autre époque et donc une autre histoire, d’autres personnages, plus connus parce que plus proches et d’une époque dont la modernité, au moins dans ses principes, ne fait aucun doute.
0 responses so far ↓
Il n'y a pas encore de commentaire, profitez-en !
Laisser un commentaire