Le rêveur sous hypnose que fut Edgar Cayce, capable par ses voyances dans le passé très lointain de l’humanité de laisser aller ses « révélations » jusqu’à la ‘création’ ni plus ni moins ne pouvait s’adresser qu’à des populations fortement imprégnées de la Bible et notamment de l’Ancien Testament, la Genèse en particulier. Je précise que ses voyances ont été enregistrées (on leur donne le nom de lectures) et largement publiées, commentées et étudiées aux USA. C’est dans le premier livre de la Torah que sont résumés et repris l’essentiel des mythes des débuts de l’homme sur la terre, condensé des histoires que l’on se racontait depuis la nuit des temps dans cette région du monde, comme le Paradis perdu ou la chute des anges qui, se mêlant aux hommes ont inculqué à ceux-ci ce qui les fait depuis différents et supérieurs aux autres êtres vivants. Le fait de relier ces connaissances bibliques à quelques connaissances extérieures comme l’Atlantide dont parlaient déjà des auteurs antiques ou des noms visiblement de l’antiquité comme cet Amilius primordial pour la construction de toute l’histoire biblique qu’il revisite en le réincarnant, à toute la lignée des prophètes et rois d’Israël, d’Adam à Jésus est assez stupéfiant mais demeure somme toute un rêve, une pure vision rétro-fictive. Et pourtant, un autre mythe des origines humaines dont je veux vous parler ici crée un parallèle tout aussi stupéfiant.
Il faut dire d’abord que là on sort du contexte biblique strict et l’on passe dans une certaine histoire au moins littéraire. Cette ‘histoire’ fut racontée par un chaldéen hellénisé qui vivait du temps d’Alexandre le Grand (milieu du IVème S. av. J.C.). La Chaldée c’est la très vieille Sumer (la plus vieille de toutes les civilisations) puis la terre de Babylone (brillante civilisation antique). Bérose, notre chaldéen recueillit dans sa « Babyloniaca » les vieux écrits de Babylone, son histoire et il dresse notamment une table des rois de Chaldée qui dirigèrent cette cité avant le fameux Déluge dont parle la Bible (le lien avec la Genèse montre qu’il s’est sans doute produit un gros cataclysme au moins dans cette région du monde dans des temps immémoriaux). Nous n’avons plus ces écrits mais nous les connaissons par plusieurs auteurs antiques qui les ont copiés: Apollodore, Africanus et Abydénus. Cette liste de rois peut, d’autre part, être rapprochée de la suite d’Adam à Noé, les personnages de la Genèse anté-déluviens. Et nous trouvons comme 3ème successeur d’Adam (l’Amilius de Cayce), un certain Amelon (correspondant à l’Enosh biblique, petit-fils d’Adam donc). Cet Amelon qui est appelé Amillarius par Abydénus confirme assez bien cette parenté lexicale commune d’autant plus que son successeur dans la liste royale s’appelle Ammenon. Sans entrer dans les détails de ce qui est dit sur ce roi et qui fera bien sûr l’objet de notice tout comme le récit des origines de l’humanité selon les plus anciens textes de l’humanité (cunéiformes et sumériens) on peut voir là, à travers ces noms peut-être moins mythiques qu’il n’y paraît, les débuts de l’histoire de notre nom, au moins en partie.
Mais nous avons par ce mythe abordé les écrits non hébraïques qui concernent notre nom. Vous le savez, l’autre origine principale de notre nom est l’antiquité latine. Je ne vais pas citer ici tous les auteurs de l’antiquité romaine, gallo-romaine, hispano-romaine …(Tacite, Plutarque, César, Jordanès, Tite-Live, Julien, Ovide, Suétone, Virgile …) qui ont parlé de notre nom latin, que ce soit pour expliquer les origines mythiques des Aemilius ou parler des très nombreux personnages qui l’ont illustré régulièrement pendant les cinq siècles de la République ou plus modestement mais régionalement durant les cinq siècles de l’Empire. Il y aura bien entendu les notices pour cela, comme il y en aura pour les auteurs de la Renaissance et des temps modernes. Juste quelques jalons pour vous montrer la diversité des inspirations: Rabelais dans « Gargantua » par exemple fait référence à ces beaux-parleurs de l’Antiquité dont un « Aemilius des temps passés »; Pascal dans ses « Pensées » parle lui d’Aemilius Paulus le vainqueur de Persée qui amena la Grèce et sa brillante culture à Rome ou les vers du hollandais Huygens écrits en 1608 qui, dans une épigramme parle de l’état de pauvreté de quelque Aemilius. Montaigne fait aussi des références à ce nom insigne de Rome tout comme Shakespeare. Un poète de la fin du XIXème S. encore un peu romantique, se lamente sur les ruines antiques ainsi: « Pas un fort, un château des vieux temps n’est debout, Pas un toit des romains pour porter témoignage Des grands noms, des grands faits du prodigieux âge; Plus rien des Scipions, rien des Emiliens; Des monuments tombés ont péri les liens » (Ch. des Guerrois 1817-1916) in « Demi-tons à demi-voix » Paris Lemerre 1891). Le nom Aemilius est employé dans nombre d’oeuvres romanesques se déroulant dans cette antiquité comme dans « Sacrilège à Rome » de J. Maddox Roberts où l’on voit le meurtre de Mamercus Aemilius Capiton, riche patricien romain ou dans des romans historiques réels comme « The grass crown » de Colleen Mc Cullough de la série Masters de Rome dans lequel évolue Mamercus Aemilius Lépidus Livianus. Certains mêlent histoire et géographie comme « Vie et mort d’Ammonius, centurion romain: voyage dans l’ Empire Romain au Ier S. de notre ère » de Cl. Dumas dans lequel apparaît un jeune Tribun Militaire du nom d’Aemilius Crispinus, tout droit arrivé de Rome en Gaule au temps de Néron et par lequel on voyage de la Calédonie (Ile de Bretagne) à l’Espagne via la Gaule. La vie administrative de ce temps-là (si importante alors) est aussi narrée, par ex. dans « L’hibiscus rouge » de D. Lançon qui décrit le périple du Chevalier Amelius Cassius, archiviste-bibliothécaire au Tabularium (les Archives de Rome) en un poème « retrouvé », traduit, accompagné d’un glossaire, de cartes et de commentaires du traducteur. Une BD. enfin avec « The comic history of Rome » dans lequel John Leech croque la vie et des personnages romains comme ce Scipion Aemilianus dont le nom ne m’est pas inconnu.
Enfin une chronique liégeoise du moyen-âge « Ly Myreur des Histors » (comprenez « le miroir des histoires ») de Jean des Preis dit d’Outremeuse publiée par Borgnet (Bruxelles) en 1864 fait référence à Rémus qui aurait fondé la ville de Reims ! mais reprend aussi à son compte l’histoire mythique des débuts de Rome alors qu’Amulius, fils du roi Procha était roi d’Albe (durant 60 ans!) et de ses rapports avec les deux frères Rémus et Romulus; mais la relation s’arrête là car l’on voit ensuite cet Amulius, qu’il appelle plutôt Amilius Oderne, roi des Latins, guerroyer non plus dans la plaine du Latium mais en Allemagne et Grande-Bretagne et ce, tenez-vous bien au temps du Roi David !! Il est vrai qu’au moyen-âge l’histoire était comme toute autre science, très approximative et aléatoire, et se confondait allègrement avec « les histoires ». Cela pour introduire le prochain article concernant particulièrement l’exploitation littéraire de notre nom au moyen-âge à travers chroniques, chansons de geste et autre mystère, genres littéraires propres à cette époque.
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