Poursuivons notre tour d’horizon de la vie quotidienne sous l’ancien régime en ce qui concerne les porteurs de notre patronyme en donnant un aperçu de ceux-ci dans la vie politique locale. Nous avons vu déjà combien les Amiel furent très proches des gouvernants nobles locaux dans la grande région languedocienne pendant le haut moyen-âge; certaines familles disparurent avec le temps, d’autres se maintinrent comme les Amiel de Tréville en Lauragais, qui de marchands puis bourgeois toulousains, élus régulièrement au capitoulat, parvinrent à se lier à la petite noblesse de Vaudreuille (près de Revel) et à se faire un nom qui traversera plusieurs siècles…D’autres plus simplement servirent leurs concitoyens en tant que simples consuls, les représentant auprès des seigneurs laïcs ou religieux, défendant les justes causes de la cité devant les pouvoirs immenses de ces nobles d’épée ou de cape. Ainsi nous trouverons cette autre famille amielienne consulaire de Marseille, notamment Jacques Amiel en 1575, François Amiel en 1588, Pierre Amiel en 1605 (cf « Liber nationis provinciaæ provinciarum » Vol. 1 MM. Monflard 1965) tous consuls de cette métropole ou enfin Louis Amiel, agent consulaire à Tunis, parent sans doute de Nicolas Amiel consul de Tunis en 1591 et des précédents. A Carcassonne quelques siècles plus tôt nous trouverons Guillaume Amiel qui est lui aussi choisi par sa propre communauté pour la représenter en 1184 et à nouveau en 1192, selon la Charte octroyée par le seigneur Trencavel à la communauté du bourg de Carcassonne (l’autre étant bien sûr l’antique et forte cité). Des convocations exceptionnelles des communautés villageoises comme les Assemblées de Baillage seront aussi l’occasion de noter quelques amieliens telle cette assemblée des Trois Etats du Baillage de Sisteron tenue en 1391 pour laquelle le bourg de Valernes va ‘députer’ Pierre Amielh pour être sa voix. Il y a aussi les temps de guerre ou les temps où il est nécessaire de se prémunir des exactions toujours meurtrières et préjudiciables à la vie quotidienne; par exemple en ce milieu du XVème S. où va sévir le trop fameux Prince Noir (Edouard Prince de Galles, futur Duc d’Aquitaine) dans la razzia (1355) où il va ravager toutes les villes qui sont sur sa route comme Castelnaudary, Carcassonne; à Lagrasse, dans les Corbières où le bruit de sa présence parvient, on institue pour se parer de la menace, un capitaine expérimenté qui dirigera la défense de la petite ville; c’est en l’occurrence Jean Amiel, habitant du lieu, qui se propose spontanément pour assurer cette tâche. C’est peut-être le même Jean Amiel indiqué alors Capitaine d’armes qui sera établi quelques années plus tard, en 1363, Capitaine du Château de Comigne (dans la même région) non plus pour se prémunir d’éventuelles nouvelles tournées de pillage anglaises, (la Paix de Brétigny de 1360 a attribué l’Aquitaine aux envahisseurs, le Prince Noir devient Duc d’Aquitaine) mais parce que des bandes de pillards se mirent à écumer la région. Il faudra encore un siècle de luttes (désastre d’Azincourt… chevauchée de Jeanne d’Arc …) pour arriver enfin ‘à bouter’ les Anglais hors de notre pays. Et la Renaissance venue d’Italie avec notamment le roi François Ier pourra alors s’épanouir, mettre fin au moyen-âge, ouvrir de nouveaux horizons … et préparer ainsi les temps modernes, je n’y reviens pas! La vie quotidienne va pouvoir elle aussi renaître dans les campagnes comme dans les villes. On voit par exemple à Villegailhenc, petit bourg proche de Carcassonne, en 1546, le sieur Pierre Amiel propriétaire du Logis de la Pomme (sur le chemin de Mazamet et qui existe toujours) offrir à la paroisse l’unique cloche qui rythmera toute seule la vie du village jusqu’en …1883 par un ‘sol naturel’. Pour la petite histoire le carillon qui lui sera alors adjoint comportera une cloche donnant, elle, le ‘la naturel’ dont le parrain fut André Amiel, l’organiste de l’église, pour le remercier de ses services et pour marraine, son épouse, Augusta Amiel-Lapeyre (poétesse). Ces derniers seront les parents de Denys Amiel (dont je vous parlerai bien un jour), écrivain de théâtre.
Il faut bien s’arrêter à ce tournant de la vie des français que fut la Révolution de 1789. On rédigea alors dans tout le pays les « cahiers de doléances » résumant tout ce qui paraissait injuste, anormal, insupportable aux communautés qu’elles soient villageoises ou urbaines; les demandes étaient si fortes et pressantes que les représentants de la majorité des français résolurent de se passer de l’avis des ordres privilégiés pour se constituer en Assemblée Nationale, début du grand bouleversement. Voici un chier de doléances, celui de Biot, rédigé en 1788 sur lequel on lit les noms de Pierre-Joseph Amiel, second consul, Honnoré (sic) Amiel, négociant, Pierre Amiel et enfin Honnoré-Joseph Amiel et dans lequel comme ailleurs on réclame plus de liberté et plus d’égalité entre les citoyens, termes qui resteront dans la devise française jusqu’à nos jours, mais ne sont-ils pas toujours et encore à revendiquer? comme les droits plus sensibles à l’éducation, au travail, au logement, à la protection sociale, à la santé, à la culture …
Le théâtre est un genre culturel qui va se développer aux XVI et XVIIème S. Plus qu’un genre d’expression, ce divertissement à la base va devenir après un moyen d’édification et d’enseignement au moyen-âge, un moyen d’expression, de revendication même qui aura totalement sa place durant les révolutions par exemple. Un lexique des troupes de comédiens du XVIIIème S. (in « La vie théâtrale en Province » M. Fuchs Paris 1933-1944) indique trois Amiel dont le plus remarquable est Pierre-Antoine Amiel qui se trouve dans la troupe de Mme de Montansier, à Versailles en 1778; on le voit peu après poursuivi par ses créanciers puis chef de troupe à Caen (sans doute régisseur itinérant d’une troupe Montansier) en 1781; il débutera un peu plus tard à la Comédie Italienne (1784) et vers 1800 il devient co-directeur du Théâtre Montansier-Variétés à Paris. Il possédait une belle propriété bien meublée et décorée à St Brice (Val d’Oise) mais j’y reviendrai en son temps.
Un mot sur quelques Amiel liés à la musique, autre genre de divertissements; et un instrument, le violon. On connait un luthier fabricant de violons du nom de Francesco Emiliani, il est italien et fut actif à Rome autour des années 1725-1733 et un futur violoniste au début du XVIIème S. (eh oui il est surtout connu comme apprenti violoniste mais il arrivera quand même à jouer comme ses pairs !) du nom de Bernard Amiel ( ses débuts dans la profession valent d’être contés…). Enfin l’Almanach Historique de la Ville de Toulouse (en fait une sorte de bottin de l’époque) indique un « musicien-chanteur » du nom d’Amiel sans plus de précisions, en 1782.
C’est avec la culture que nous reprendrons notre visite parmi les Amiel des anciens temps, alors qu’il n’y avait pas beaucoup de facilités pour vivre une vie moderne bien différente des quelques siècles précédents. Mais les XIX et XXème siècles ont mis un coup d’accélérateur proportionnel aux découvertes (techniques, scientifiques, industrieles) réalisées; quant au XXIème dans lequel nous sommes tous embarqués même si nous sommes sans doute mal placés pour le juger, il n’y a pas à être grand clerc pour dire qu’il ne tourne pas très bien, peut-être est-ce dû à la vitesse à laquelle nous le faisons passer … et aux découvertes et innovations dont on nous abreuve tous les jours. Regardons le passé et, sans y revenir, tirons-en quelque enseignement, c’est tout ce que je vous souhaite en me lisant!
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