La Renaissance dont nous avons vu les caractéristiques générales vit donc l’Eglise de Rome entreprendre une contre-offensive avec de nouvelles armes dont le but était d’éliminer les idées nouvelles du Protestantisme. Le fameux Concile de Trente eut à organiser la mise en pratique de la contre-réforme. Parmi les nombreuses idées appliquées figure le culte rénové des reliques des saints: glorification de leurs actes, diffusion de leurs « Vies », fêtes et processions, pèlerinages (et indulgences à la clé!), béatifications et sanctifications nouvelles, nouvelles reliques puisées aux Catacombes de Rome (des Martyrs des temps apostoliques) les Saints et Bienheureux furent largement mis à contribution pour redorer (le mot n’est pas trop fort, vu le luxe ostentatoire montré alors dans les églises, y compris souvent les plus humbles ou reculées) la renommée (au sens ancien) de l’Eglise Catholique et Romaine. Et c’est l’occasion pour moi de vous parler de ces saints aemiliens qui furent redécouverts alors; je dis bien des saints des premiers siècles, ceux dont le nom même était aemilien (et non ceux dont le prénom fut émilien, Emile, hors de mon propos), ceux qui ont vécu avant le XIème siècle dirons-nous. S’y ajouteront toutefois ceux dont le nom patronymique est aemilien, ce qui me semble logique. Ainsi il y a lieu par exemple de distinguer St Aemilien de Trévi (du IIIè-IVè S.) dont nous verrons quelques traits, de St Emilien de Faenza qui vécut au XVè S. dans le même Trévi et dont il n’y a pas lieu de parler: vous me suivez!
Et nous commencerons par cet Aemilien de Trévi: Arménien de naissance (IIIè S.) il vînt prêcher l’évangile à Spolète et devînt évèque de Trévi en Ombrie (Italie); pour certains hagiographes (auteurs de vies de saints), il fut martyr avec ses amis Denis et Sébastien en 302, et est honoré en tant que tel depuis le IVè S. à Trévi. Un siècle auparavant eut lieu le martyr des Saint Aemilius et Castus, sous le règne de Septime Sévère, en Tunisie, à Carthage. Arrêtés durant la persécution de Dèce, ils furent suppliciés et se rétractèrent une première fois. Mais ils se ressaisirent et affirmèrent alors leur foi devant le juge avec un grand courage dit St Cyprien, et furent brûlés vifs (les croisés cathares n’ont donc rien inventé à ce sujet). Outre St Cyprien, St Augustin (qui fut leur contemporain) fit aussi leur éloge. Leur martyr eut lieu vers 250. Peu après et dans la même région eut lieu le martyr d’Aemilianus, chevalier romain, arrêté aux environs de Constantine et qui périt à Lambèse avec Jacobus et Marianus, sous Valérien, en 257. Plus détaillé est le martyr de Aemilianus qui eut lieu à Dorostore, en Thrace (confins de la Grèce, Turquie d’Europe et Bulgarie) au IVème S. sous l’empereur Julien l’Apostat. Il n’était qu’un jeune soldat romain lorsqu’il pénétra dans le temple païen, renversa l’autel, brisa les idoles statufiées et jeta au vent les entrailles des victimes du culte et les libations (offrandes liquides). Il vînt lui-même se livrer , le délit étant évident, le procès ne fut pas long. Sur ordre du vicaire du Capitole local il fut frappé toute une journée à coups de nerfs de boeuf et enfin jeté dans une fournaise. Sa jeunesse, son courage, la noblesse de ses aveux, l’horreur de son supplice enfin, tout en fît aussitôt le héros chrétien par excellence: « les magistrats de Julien n’avaient vu que la loi violée, les peuples ne virent que la foi vengée » dirent les chroniques (cf St Jérome, « Chron. »; « Chron. Alex. p 590; Théophane, « Chronographie », ed Bonn 1839). La disproportion entre un si affreux supplice et un si léger tort fit de Saint Aemilien pour l’Eglise, un véritable martyr (cf « L’Eglise dans l’Empire Romain au IVème S. » Part II A. de Broglie Didier Paris 1862). Il est honoré dans le rite slave de l’Eglise Orthodoxe sous le nom grec d’Aimilianos, tout comme cet évêque de Cyzique et du Propontis martyr du même nom. A la fin du Vème S. alors que les Vandales avaient conquis aux Romains la Byzacène (Tunisie), et que ceux-ci n’étaient pas christianisés, les chrétiens, pourtant autorisés à pratiquer leur culte depuis plus d’un siècle selon les lois romaines, eurent à subir des vexations de la part des nouveaux occupants. Ce fut le cas d’Aemilius de Vite, aussi appelé Amiel quelquefois (bien que je le répète il n’y a pas de St Amiel en tant qu’ amielien). Il était un mèdecin âgé et eut son sang répandu en 484 sous le règne du roi Huméric, avec plusieurs autres chrétiens dont Ste Denise et son fils Majoric car ils avaient tous décidé de rester fermes dans leur foi. L’Empire Romain d’Occident prend l’eau de toutes parts en cette fin du Vème S. on l’a vu, et notamment en Europe. L’Europe continentale voit les peuples anglo-saxons déferler et s’installer au sud du Rhin et du Danube, l’Espagne va avoir la présence wisigothe chrétienne pendant deux siècles mais succombera à la déferlante arabe et musulmane. Et les persécutions anti-chrétiennes reprirent bien entendu. Ainsi un diacre du nom d’Aemilius fut martyr avec St Jérémie lors de la persécution du roi (ou calife) Abd-El-Rahman en 852. Un autre Aemilius fut martyr en Sardaigne avec St Lucien et deux autres chrétiens.
Dans une deuxième partie nous verrons trois grands saints aemiliens, l’un espagnol, le deuxième français, le dernier italien, chacun ayant marqué l’histoire de son pays de façon différente mais toujours instructive.
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