Les AEMILII en ESPAGNE et en LUSITANIE :
Les Aemilii sont bien connus en Espagne et plusieurs sont insérés non seulement dans la vie administrative mais aussi dans la vie économique. Ils représentent le quart des gentilices les plus fréquents de l'épigraphie romaine dans la péninsule (cf. J.M. Abascal (1994) pp. 67-72), présente à partir du début du IIème S. car les Aemilii de Rome y furent souvent gouverneurs, depuis L. Aemilius Paulus en -191 -190. Sous Auguste alors que le 1er empereur venait de soumettre les Cantabres et les Astures, il quitta l'Espagne en instituant L. Aemilius commandant des Légions de la péninsule. Occupant donc une part majeure des "nomina" hispaniques ils formeront une partie importante des "gentes maiores", se concentrant surtout dans les diverses "civitates" (cités) du Levant comme Tarraco, Barcino, Sagonte et Carthago Novo. Dans le sud elles apparaissent à Carmo, Munigua, Obuleo, Singilia Barba,ou Urgavo Alba (cf. S L Dyson,(1980)-81 pp.267-272; C. Castillo ou J.F. Rodriguez Neila). A Acinipo ils formeront par ex. l'une des familles de l'élite locale avec des Annioleni, Fabii et Servilii. (rèf. * ci-après).
Les romains installés, le commerce et l'exploitation des ressources régionales s'organisa. On connait par ex. pas moins de sept diffuseurs d'huile d'olive du nom aemilien. Beaucoup sont des anciens affranchis. Souvent aussi il s'agit de propriétaires terriens exploitants mais ne commercialisant pas leurs productions. Ils vendaient leurs productions à des 'negociatores' car si l'agriculture fut une activité tout à fait honorable car immémoriale, le commerce était plutôt déshonorant du moins pour les hautes classes; on peut citer comme intermédiaire Flavianus L. Aemilius qui exerça ce métier commercial sous l'empire. Des Aemilii sont connus au Ier quart du Ier S. à Carthagène. A Sagunto et Almenara dans la province de Valence, au sud de la péninsule, ils sont avec les Baebii et les Iulii les principaux possesseurs ruraux d'après les 40 textes lapidaires étudiés par l'archéologue Pierre Guérin entre 2003 & 2005. Le district d'Astigi a conservé les noms de nombreux Aemilii du IIème S. et un "Fundus Aemilianum", domaine d'un producteur terrien, y est même attesté en 154. D'autres sont artisans, potiers par ex. ou exploitent des mines pour l'empereur. On a trouvé à ce sujet près des côtes de Majorque, aux Baléares, des lingots de plomb venant des mines de la Tarraconaise et destinés à Rome comportant outre les titres impériaux (ici Vespasien & Titus) les noms des exploitants dont celui de Publius Aemilius Gallicus, un gaulois donc.
De même en Lusitanie (Portugal) on trouvera par ex. une Aemilia Saturnina, peut-être affranchie, décédée à 64ans vers la fin du IIème S. ou début du suivant à la villa de Marim (Quelfes, Olhâo, Faro) ou un Aemilius Aemilianus cité entre 285 & 305 sur une inscription où l'on lit qu'il fut le 1er préteur de cette province auparavant dirigée par un légat. Aurait-il un lien familial avec l'empereur du même nom qui régna en 253 ?
(=> * "Los municipios flavios de la Betica - Repositorio Institutional de la Universidad" E. M. Morales Rodriguez 2002; "Elites coloniales - Migrare" A. Padilla; Univ. de Sevilla).
AEMILIUS HISPANUS:
Selon certains il était 'maquignon' selon d'autres 'vétérinaire' ce qui est certain c'est qu'il s'occupait de chevaux (mulio) en tant que 'mulomedicus'. On le connait notamment par un manuscrit conservé au British Muséum (n° 9K5108), fragment d'un traité sur des épidémies chevalines dénommé Hippatrici Beronendia dans le Corpus Hippiatriorum Graecorum. Il peut s'agir aussi de Aemilianus dont parle Isodorus d'Hispanie (Isidore de Séville) dans son "Orig." XIII,1,1.
C. AEMILIUS Potier espagnol:
Cet homme fut un potier connu du Ier - IIème S. On a trouvé à Narbonne une marque de fabricant antique "CAEMIEL" datée entre 90 et 140 de notre ère, d'un certain C. Aemi(lius) (H)el(iodorus) dont le nom aurait été résumé dans ce raccourci, sorte d'acronyme plus facile à indiquer sur un tampon signant la production. Il est possible qu'il s'agisse de sa marque.
(=> "Narbonne antique: des origines à la fin du IIIème S." M. Gayraud. Diffusion de Boccard 1981).
AEMILIANUS :
Cet homme dont nous n'avons que ce surnom fut Gouverneur de Terraco en Hispania Citériora sous l'empereur Gallien. (cf. Prud. "Perist" VI 34,41).
Des AEMILII à BARCINO :
On trouve dans cette ville de nombreux aemiliens; plusieurs sont magistrats municipaux : C. Aemilius Antonianus, M. Aemilius Optatus, édile et duumvir, G. Aemilius dont le fils fut aussi édile et duumvir. Il y eut également vers 120 C. Marius Aemilianus dont la mère parait avoir été une Aemilia, qui fut triumvir, flamine de Rome et du divin Auguste et enfin juge; son épouse s'appelait Vibia Liviane.
(=> "Un parti hispanique à Rome ?" Fr. des Boscs-Planteaux, Casa de velasquez, 2005).
La tribu AEMILIA à TERRACINA :
Plusieurs Aemiliens sont connus à Terracina dès le début du IIème S. avant J.C.
C. AEMILIUS FRATERNINUS et sa famille :
Connu par l'inscription CIL II, 4188 de Terraco, son cursus est direct et culmine avec la plus haute distinction provinciale, celle de Flamine de la Province d'Espagne Citérieure, fonction confiée aux plus importants personnages de la province. Cette haute prêtrise fut précédée d'une carrière équestre dont la double préfecture des ouvriers et le tribunat légionnaire. C'est en tant que tribun militaire qu'il mena le recensement en Aquitaine sans doute en +60 (Tacite, Annales, 14,46). De retour en Hispanie c'est alors qu'il fut flamine provincial, dès que ce poste fut créé. Il était d'Aeso, ville où l'on connait un autre rameau familial sous Domitien et Trajan; ces derniers appartient aussi à l'ordre équestre : M. Aemilius Fraternus, tribun militaire et son frère L. Aemilius Paternus qui préfèrera après la préfecture des ouvriers suivre la carrière centurionale et devint primipilaire. Leurs parents, L. Aemilius Paternus et Fabia Fusca eurent aussi deux filles : Aemilia Paterna et Aemilia Materna; la 1ère fut aussi flaminique de la province (CIL II 4460, 4458, 4490, 4462). Il est amusant de voir que cette famille prit des agnomen, des surnoms liés à ces rapports familiaux.
Q. AEMILIUS VERNACULUS :
Ce personnage est connu par une inscription de Munigna, en Bétique (Andalousie depuis les arabes). C'est un habitant de ce lieu, il est bien qualifié de Munignensis, et l'on apprend sur cette pierre qu'il fut l'heureux héritier d'un bien situé à cet endroit, un bien qu'il accepta et pour lequel il honore sa légataire, Quintia Flaccina !
(=> "The roman community at table during the Principate" J. F. Donahuc, 2004).
C. AEMILIUS NIGER et ses AFFRANCHIS :
Toujours en Bétique fut trouvé en 1983 un piédestal de statue dédiée à C. Aemilius Niger, notable et citoyen romain de Sexi dans la tribu de laquelle il était inscrit. Sa stèle a été commandée par ses affranchis : Aemilius Ligurius, Aemilius Italicus et Aemilius Delius "à leur ami exceptionnel pour son extraordinaire libéralité". Il faut préciser que les Aemilii comptaient à Sexi parmi les "gens" influentes : à côté de Aemilius Niger est noté le nom de C. Aemilius Cantabricus Sexitanus et nombreux sont les Aemilii de la Province de Grenade. Enfin cet Aemilius Niger fut un industriel et son piédestal fut mis au milieu de ses "usines" alimentaires puisqu'il fut un industriel de la saumure, de cette exploitation marine utilisant autant le poisson que le sel. Dans sa cité il fut un prêtre provincial du culte impérial de Bétique.
(=> "Itineraria hispanica : recueil d'articles de Robert Etienne réunis par F. Mayet, Ausonius - Scripta Antiqua, 2006).
AEMILIUS FLORUS PATERNUS et son père FLORUS NIGRINUS :
C'était un notable hispanique qui fut Proconsul d'Afrique en 395. On pense qu'il serait né vers 360; fils de Florus (335 - ap. 383) il fut marié à la fille d'un Maternus Cynegius dont il eut Cynegius. Ce fut un proche de l'empereur Théodose qui était lui aussi hispanique, tout comme le fut son père Florus qui servit cet empereur comme Préfet Prétorien; ils étaient membres d'un ensemble de nouveaux venus à sa cour, tous hispaniques. D'ailleurs on sait que Aemilius Florus succéda lui-même à son père et à son beau-père Maternus. Le père Florus devint même consul en 388.
- Aemilius Florus eut une carrière administrative impériale; on sait par exemple qu'il fut "comes sacrum largitionum" (légat) de 396 à 398 après avoir été proconsul en 395. Il intervint auprès de l'évêque de Milan, Ambroise, en 396, dans l'espoir que celui-ci l'appuie auprès de Théodose à propos du mariage quelque peu consanguin de son fils Cynegius avec une nièce, en violation des lois impériales régissant le mariage; et l'empereur refusa pourtant la dispense, ceci dit présentée par un notable religieux qui eu égard à sa fonction n'aurait pas dû en conscience s'y préter. On voit que de tels passe-droits ne sont pas nouveaux chez les puissants !
- On peut aussi ajouter que bien avant, au Ier S. alors que l'on adorait les dieux que l'on voulait, il était habituel de faire appel directement à eux sans passer par un quelconque représentant: une tablette de plomb, trouvée à Chamalières (Loire) en 1971, dans les fouilles de la Fontaine des Rochers, appelle le dieu celte arverne Maponos à aider Florus Nigrinus (un lointain parent gallo-romain ? cf. article page gallo-romains du nord) et Aemilius son père (?) à les soutenir tous deux pour que "vainqueurs et pacificateurs apportent par le sort un accord de paix", mais là l'intention semblait plus louable bien qu'orientée !
AEMILIA MARCELLA et sa fille AEMILIA BLANDINA :
C'est par une inscription funéraire retrouvée récemment dans les archives de la Real Academia de la Historia que l'on a connaissance de cette famille. Bien que certaines lettres finales ne soient pas gravées on a pu reconstituer la forme latine des noms cités. C'est Aemilia Marcella à la forme nominative qui est la dédicante à sa fille Aemilia Blandina qui elle, a curieusement son nom de gens au datif et son surnom au génitif; il y est indiqué qu'elle est Arcobrigensis, c-à-d de la ville d'Arcobriga; si le nom d'Aemilia est courant par contre le cognomen de Blandine est rare en Hispanie. Enfin Arcobriga est traditionnellement situé à Cerro Villar de Monreal de Ariza dans la province de Zaragoza sur la Via Augusta Emerita - Caesaraugusta.
(=> article du Pr. Palazon & C. Fernandez du Parc Archéologique de Segobriga in "Antigua" Lucentum XXIII-XXIV; 2004-2005).
AEMILIUS RUSTICUS & deux AEMILIA à CELTI :
Aemilia Artemisia uxor, Aemilius Rusticus et Aemilia Artemisia filia (CIL 02, n°2326 - Celti - IIème S. ?) sont cités avec un Annius qui est le maître de maison. Leur épigraphie est illustrée par des offrandes qu'Annius consacre à son épouse, à sa sœur et à sa mère. Les deux familles étaient riches. M. Annius Celtianus ordonne par testament la consécration d'une statue de Vénus Auguste (en argent semble t-il) en l'honneur de son épouse et héritière Artemisia (mère), qui devait être représentée en Vénus, "in formam Veneris". Sa fille de même nom, elle porte en effet curieusement le même gentilice que sa mère, Aemilia (considéré sans doute comme plus prestigieux ?) qui réalisa le projet, y ajouta un anneau d'or avec des pierres précieuses et Aemilius Rusticus (son oncle ?) y joignit une 'phiale' (coupe) et une 'trulla' (écumoire, poêle ou cuvette ?) en argent ! Cet Annius parait avoir été un notable de sa ville Celti (de nos jours Penaflor, province de Séville, en Andalousie), sur le Guadalquivir. Ce fut alors un port d'embarquement de produits miniers, d'huile et un centre très actif de céramique. Sans doute cet Annius tirait-il sa richesse d'un négoce lié à l'une de ces activités et il se peut que son mariage avec une Aemilia ait contribué au succès de sa profession ? Car les Aemilii sont nombreux parmi les 'mercatores' attestés au Testaccio (Rome) peu avant l'an 150. Il s'y trouve même un Aemilius Rusticus (un indigène ?) dont les marques estampillées ont été trouvées en plusieurs lieux d'Andalousie (marque M.A.R.) Peut-être fut-il le frère d'Aemilia Artemisia (mère), fabricant d'amphores et 'negociatore olearius' marchand d'huile en gros. D'autres Aemilii sont connus à Celti par ailleurs.
(=> article H44 des "Notices prosopographiques d'Hispanie" A. Villaret, Archives Ouvertes, 2016).
CN. PAPIRIUS AELIANUS AEMILIUS TUSCILLUS :
Personnage de haut rang indiqué sur une élégante inscription de l'époque antonine trouvée dans la rue Maria de La Miel (! hasard de la langue des oiseaux ?) à Illiberis (Grenade). Il fit toute sa carrière honorifique durant les règnes d'Hadrien et Antonin le Pieux. Il commença son cursus honorum comme questeur, tribun de la plèbe et préteur, puis fut légat d'Auguste de la Légion XII, sénateur, gouverneur de Dacie (Roumanie) en 132, rapidement ensuite Consul et enfin gouverneur de Bretagne en 146. Un neveu Cn. Papirius Aelianus fut aussi sénateur et consul ordinaire de Rome en 184 sous Commode.
Un AEMILIUS militaire en Europe Centrale :
Parmi tous ceux qui s'enrôlèrent dans les armées romaines, partis défendre la Pax Romana loin de chez eux on peut citer l'espagnol Caïus Aemilius Fraternus; cité sur une inscription (CIL II 4188) il commença sa carrière comme Préfet des Ouvriers puis fut Tribun Militaire de la Légion V Alauda en Germanie Inférieure et à 61 ans il assurera le recensement en Aquitaine.
(=> "Migraciones en la Hispania Romana de época imperial" J. M. Blazquer Martinez, Revue Antigua).
D'autres AEMILII Hispaniques :
- Aemilius Paternus : il était natif de Tarragone, appartenait à la tribu Quirine; il fut "duumvir bis" sous Tibère puis Sévir Augustal entre 110 et 140.
- T. Aemilius T. f. Mummius Priscus Cornelianus Lepidus : d'une affirmation appuyée à la gens Aemilia, il fut Pontife, Flamine du culte impérial de Tibère et tribun militaire de légion vers les années 14 à 37 à Segovia.
(=> "Algunos consideraciones sobre municipios flavios" L. Hernandez Guerra, Univ. de Valladolid, 2008).
- T. Aemilius Pudens : magistrat ou prêtre ayant payé des hommages civils sous forme d'inscriptions et statues d'au moins trois piédestaux connus, sans pour autant avoir participé à leur dédicace, à Munigua, pour des personnes de l'importante famille aemilio-pudentienne de ce lieu.
Une EPITAPHE explicite :
Classée sous le numéro AE 1966, 0210 voici la traduction de son texte : "Aux dieux mânes. A Helvius Natalis, sévir augustal de la colonie de Barcelone, à Aemilia Fidentina, son épouse; à Hiberalis et Marcella, leurs affranchies. Ce tombeau fait partie de l'héritage. N'y fais pas tes besoins." !
Des inscriptions nombreuses; quelques ex." :
Relevées dans le nord-ouest plusieurs sont de la province de Burgos (notée BU) et d'autres de la province contigüe de Soria (SO) où le nom aemilien est attesté chez les celtibères citérieurs, Arévaques et Pélendons en forte proportion.
- L. Octavius Aemiliani f(ilio) Marcellus : à "Clunia", Penalba de Castro (BU) cité dans CIL II 6338m;
- Antonius Addius Eburancus Aem(iliani) f. : à Dombellas (SO) cité dans ERSoria, 59 et HEp, 9, 529;
- Aemilia Acca Medutticorum Barbari mater Medutticorum : à Barcebalejo (SO) in AE, 1925, 22;
- Aemilius Severus Agirseni f. : à Vizmanos (SO) cité dans AE, 1990, 572 et HEp, 3, 363;
- Aemilia Elita (?) Aionis f. : à "Vxama Argaela", San Esteban de Germaz (SO) in ERSoria, 103;
- M. Aemilius Murrinaus Carbili f. Vxamensis : à "Clunia", Penalba de Castro (BU) in CIL II, 2787;
- Aemilius Firmus Quirinus : à "Clunia" aussi in ERClunia, S-19 et HEp, 5, 146;
° On a aussi des noms d'esclaves tels :
- Athenais Aemiliae Paterna(e) [a]ncill[a] : à "Nova Augusta", Lara de los Infantes (BU) in EE, VIII, 153;
- Felicio Aemiliae Patern(a) seruus : à "Nova Augusta", idem ci-dessus.
° D'autres inscriptions des provinces de Lérida et Léon :
- [C. Aemilio C. f.] Q[uir....] Fabia C[...] mater Aemilia Press[a] sora L. Aemilius C. f. Crescentius patruus her. ex. test. : à Isona (Lérida);
- Aemiliae Ammiae M. f. an. XVII [A]emilius [P]ressus : à Léon in CIL II, 2676;
° et un cas fragile, pourtant référencé ! :
- Ti. Claudio Aemilii f. Quir. Presso quaestori Araugustanoru(m) sacerdoti Romae et Aug(ustorum) delectatori Imp(eratori) Galbae Aug(usti) Aemilia Alla et Aemilia Auga patri : cité dans NW Hispanian (Eck 1997), mais d'une authenticité douteuse, cf. AE 1997, 766 et HEp, 15, 421.

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