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**L'ARCHEVEQUE DE NARBONNE PIERRE AMIEL selon la BIOGRAPHIE des BENEDICTINS DE ST MAUR** :
Né vers l'avant dernière décennie du XIIème S. Pierre Amiel nommé quelquefois "fils d'Améli" (sic) Petrus Amelii ou Petrus Amelius en latin, Archevêque de Narbonne et Primat de Septimanie, fut qualifié par un historien des évêques de Narbonne "vir eximius et eloquens". D'abord clerc de St Nazaire de Béziers en 1201 il devint en 1216 camérier et successivement chanoine et archidiacre de l'église de Narbonne selon la Gallia Christiana (T. I, p.65). Parvenant à être élu pour occuper le siège épiscopal de cette métropole le 17 des calendes d'Avril 1225 (1226 depuis que l'année commence en Janvier) Pierre Amiel ne tarda pas à recevoir au nom du pape et du roi de France, plusieurs châteaux dont Raymond de Roquefeuil dut se déposséder en témoignage de sa soumission et en pénitence de l'excommunication encourue en prenant parti pour l'hérésie cathare, dit Don Vaissette (HGL T. III, p.352) . Peu de temps plus tard il sera l'intermédiaire entre Agnès, vicomtesse de Béziers et le roi de France. Et vers ce même temps, la croisade albigeoise semblant se terminer (ce ne fut qu'un apaisement cependant) Pierre d'Amelii vint en députation à Paris avec les évêques d'Albi et de Castres pour apporter au roi les serments de fidélité des habitants de cette dernière ville ainsi que la soumission des vicomtes de Béziers. Honorius III par une lettre qu'il lui adressa lui fit concession des dîmes acquises par son prédécesseur; et le roi Louis VIII lui cédait, moyennant un tribut, tous les biens de sa province ecclésiastique dont les nobles faydits locaux furent dépossédés après leur défaite suivant un acte de reconnaissance du prélat Amiel daté d'octobre 1226 (HGL, T. III, p.365).
Durant le carême de 1227 Pierre Amelii tint un synode provincial à Narbonne, dans lequel furent rédigés des statuts en 20 chapitres; on y remarque les peines encourues par les juifs en raison de taux d'usure exorbitants ainsi que contre les chrétiens qui étaient leurs emprunteurs ou qui fraternisaient avec eux. Chaque famille juive y est condamnée à payer, aux fêtes de Pâques, 6 deniers de melgueil. Il y est ordonné d'excommunier, tous les dimanches, les usuriers comme les incestueux ou les voleurs etc... On y défend de lever des tailles contre les clercs et on y institue ceux qui auront à rechercher les hérétiques et criminels publics. Il y est recommandé de se faire ordonner prêtres à ceux qui, par la ruse ou la force, envahissaient les biens de l'église, à ces laïcs qui, pour s'en assurer la possession, osaient se dire, se faire 'baptiser' archiprêtres, prévôts ou abbés.
Pierre Amiel se trouva en 1228 aux conférences tenues à Meaux puis Paris au sujet du Traité de Paix à établir entre le Comte de Toulouse et le Roi de France qui sera signé en 1229 (cf. Guillaume de Puylaurens, ch.39). Il sera aussi du nombre des chefs qui conduisirent les troupes pour l'expédition qu'allait faire en Orient l'empereur Frédéric II mais il ne s'est pas embarqué puisqu'il assiste en 1229 au synode que le Légat Romain de St Ange convoqua à Toulouse (HGL, T. III, p.382) pour y prendre les mesures adéquat contre les hérétiques; lesquelles aboutirent à l'établissement de l'Inquisition dans tout le pays.
Au sortir de ce synode, Amiel réitéra avec le jeune roi Louis IX par l'entremise de Guy de Lévis, l'accord qu'il avait passé avec son père concernant les biens confisqués aux hérétiques que le roi lui avait concédé; et toujours occupé par ce sujet, il prit en 1230 un nouvel acte par lequel les citoyens de Narbonne juraient au pape, en la personne de l'archevêque de Vienne, son légat, de défendre la religion catholique, de faire en conséquence la guerre aux hérétiques et à ceux qui les soutenaient.
Mais doutant que cet engagement pourtant solennel soit tenu par les narbonnais, il n'hésita pas à introduire les Frères Précheurs (Dominicains) à Narbonne dès 1231; il leur donna une maison, des terres et leur fit présent d'une bible enrichie de gloses. En 1232 il exigea même d'Aymeric, vicomte de Narbonne, un acte par lequel il se reconnaissait son vassal ! Dans l'assemblée qui fut tenue à ce sujet, Pierre Amiel confirma cependant toutes les coutumes municipales en place. Dans cet acte il est fait mention du "Capitole de Narbonne" gallo-romain qui était alors situé dans la partie de la ville soumise au vicomte, c'est donc qu'il en restait encore des reliefs.
Un débat eut lieu entre lui et les religieux d'Alet touchant aux revenus abbatiaux que Pierre n'hésitait pas à réclamer pour son propre chapitre cathédral, et donc au détriment de celui d'Alet; pour cela il alla même à Rome plaider sa cause devant le pape, lequel fit examiner la chose et régler sur place par son légat, l'archevêque de Vienne. Il voulut ensuite exiger des habitants de Narbonne un nouveau serment par lequel ils se soumettaient aux dispositions du concile de Béziers qui venait de s'achever, ce qui les souleva contre lui; il fut même chassé de la ville et de graves évènements s'en suivirent dans la cité en 1234. Il usa sans se démonter du droit d'excommunication et rentra dans sa ville en 1235. Ce retour bien que fait avec le consentement forcé du peuple, n'empêcha pourtant pas les Narbonnais furieux d'envahir le couvent des Frères Prêcheurs, comme le firent les toulousains chez eux et de les expulser même de la ville à leur tour.
Au zèle anti-hérétique, à l'empressement qu'il mit à défendre ses droits sacerdotaux, épiscopaux et seigneuriaux, il faut ajouter son ardeur guerrière. Il n'hésita pas à se porter en effet au secours du roi d'Aragon, Jacques Ier, occupé à combattre les Maures. On sait qu'il partit pour cela en 1238 pour l'expédition de Valence et, quand même incertain de son issue, il préféra faire son testament ! On l'a conservé (Gallia Christ. T. VI, c.68): on peut y lire la fortune nobiliaire d'un grand prélat de ce temps ! Pourtant il n'y "couche" aucun parent et il n'y est question d'aucun bien immeuble, foncier. Il dispose uniquement de ses biens mobiliers à destination surtout du chapitre (qui était alors à St Paul-Serge, la cathédrale St Just ne sera construite que plus tard), il fonde des chapelles et des messes pour le repos de son âme (et il en eut bien besoin !) lègue son argenterie à la cathédrale, ses livres aux "escholiers" qu'il entretenait comme cela se faisait, à l'Université de Paris et ses lits aux hôpitaux. A Valence il montrera un grand courage "et archiepiscopus Narbonensis strenue dimicavit" soit l'archevêque de Narbonne a combattu énergiquement, dit la Chronique d'Albéric. Et Valence fut bel et bien reprise; il revint sain et sauf à Narbonne, le roi d'Aragon reconnut ses services éminents par le don de plusieurs lieux castraux. Il échangera ces biens avec le même roi le 7 avril 1239 à Montpellier, ville aragonaise, contre des maisons dans cette ville, semble t-il.
En 1239 toujours, il donne une nouvelle preuve de son courage au service du roi de France cette fois, lorsque Raymond Trencavel le Jeune, Olivier de Termes et d'autres seigneurs audois ayant envahi Carcassonne, il accourut vers la Cité avec l'évêque de Toulouse, chacun à la tête de leurs gens d'armes; ils combattirent pour défendre les nouveaux droits acquis du roi sous les ordres du maréchal Guy de Lévis, ceci en 1240; ils parvinrent évidemment à rétablir "l'obéissance" au roi !
Vers ce temps encore il s'éleva une contestation entre Pierre Amiel et le vicomte Aymeric à propos du droit de battre monnaie et ce dernier, ayant appelé à son secours quelques troupes de catalans, força son adversaire à s'éloigner de Narbonne; exit Amiel à nouveau !
Peu de temps auparavant il s'était aussi attiré l'adversion de son propre chapitre en privant quelques chanoines de leurs bénéfices et en voulant contraindre les autres à administrer eux-mêmes leurs églises ! La contestation fut portée devant un arbitre neutre en la personne du prieur de Montpellier, lequel trancha en faveur.... des chanoines ! Mais, à la décharge d'Amiel, il est vrai que ces chanoines l'avaient bien cherché : dans deux lettres de 1241 ils lui faisaient des reproches sur sa conduite peu cléricale; dans ces lettres il était invité à ne pas confirmer l'évêque nouvellement élu de Béziers sans avoir consulté son chapitre; il faut dire qu'il y a bien longtemps déjà que ces élections n'étaient plus du ressort des églises concernées. Mais on a là un cas rare en ce temps d'un chef religieux élevé, censuré par ses inférieurs, c'est dire si le climat devait être tendu à l'archevêché ! Sans parler du vocabulaire employé, des termes bien sentis sans aucune ambiguïté et qui ne laissaient aucune interprétation possible. Voici en quels termes les chanoines ont vertement admonesté leur archevêque : il y est accusé de négliger les droits et devoirs épiscopaux, de passer sa vie à cheval au détriment de son propre corps et à la honte de ses diocésains, d'excommunier les gens pour mettre à prix son absolution, d'absoudre pareillement les hérétiques moyennant salaire, de recevoir les présents des juifs au détriment des chrétiens, de s'approprier les fruits (bénéfices) des diocèses vacants, de ne tenir aucun compte des anciens droits et (surtout) d'imposer des charges nouvelles, soit aux clercs soit aux églises de son diocèse, pour rendre sa table plus somptueuse, enfin d'affecter un langage hautain, insultant et quelquefois scandaleux... et alia quam plurima, ainsi que plusieurs autres griefs !!!
P. Amiel eut encore en 1243 l'occasion de donner des preuves de sa valeur.... guerrière en contribuant par sa personne comme par ses gens d'armes à faire le siège de Montségur durant l'hiver 1243-1244. On sait comment se termina cet ultime épisode de l'église cathare. Peu après il rédigea une lettre circulaire à ses évêques suffragants afin "d'exciter leur zèle pour l'œuvre salutaire de l'inquisition". Il écrivit aussi conjointement avec les autres autorités narbonnaises, au roi Louis IX sur l'irruption faite par les gens du bourg dans la maison des frères mineurs, qu'ils avaient chassés pour la convertir en maison d'accueil des hérétiques !
Un synode des trois provinces ecclésiastiques de Narbonne, Arles et Aix fut ensuite convoqué par lui et qu'il présida sans doute en 1244 (selon la Gallia Christ. et l'HGL). Il y fut question de la conduite inquisitoriale à tenir devant les hérétiques; des conclusions en 29 chapitres furent rédigées qui réglèrent le sort des condamnés comme la façon de procéder. "C'était plutôt une affaire de politique que de religion, et le parti qui voulait se séparer du reste de l'état par ses croyances était forcé d'y rentrer ou de se voir anéantir" c'est ce qu'affirme quand même le religieux bénédictin auteur de la biographie. Henri de Spade (Spondanus ad anu 1235) qui parle des peines déjà prévues alors et infligées, reconnaissait que tout cela respirait la plus grande sévérité, conforme du reste aux mœurs du temps : "Suntque valde severa, prout ferebat praxis ejus temporis", soit (ces peines) sont très sévères, conformément aux usages de ce temps.
L'année suivante, enfin, en 1245, Amiel fit un nouveau testament; il contient notamment un legs au pape Innocent IV par lequel notre prélat lui donne son blé, son orge, ses porcs (!) et ce pape en demandera effectivement l'exécution quelques temps plus tard à son successeur Guillaume de la Broüe car Pierre Amiel mourut à Narbonne le 20 mai 1245 selon les nécrologes de la ville comme ceux de Béziers et du monastère de Cassan, alors qu'il se préparait à se rendre à un concile à Lyon. Sa sépulture fut faite dans l'église du monastère de Cassan (Hérault). Bon débarras finalement, non ?
(d'après "Histoire Littéraire de la France..." Congrégation de St Maur continuée par les membres de l'Institut de France ensuite. T. XVIII; Paris, Didot, 1835; le contenu de la lettre de reproches de 1241 est tirée de "Le dernier des Trencavel..." Vol. II L. XVI, p.223, H. Reboul; Paris, Tenon, 1835).
Né vers l'avant dernière décennie du XIIème S. Pierre Amiel nommé quelquefois "fils d'Améli" (sic) Petrus Amelii ou Petrus Amelius en latin, Archevêque de Narbonne et Primat de Septimanie, fut qualifié par un historien des évêques de Narbonne "vir eximius et eloquens". D'abord clerc de St Nazaire de Béziers en 1201 il devint en 1216 camérier et successivement chanoine et archidiacre de l'église de Narbonne selon la Gallia Christiana (T. I, p.65). Parvenant à être élu pour occuper le siège épiscopal de cette métropole le 17 des calendes d'Avril 1225 (1226 depuis que l'année commence en Janvier) Pierre Amiel ne tarda pas à recevoir au nom du pape et du roi de France, plusieurs châteaux dont Raymond de Roquefeuil dut se déposséder en témoignage de sa soumission et en pénitence de l'excommunication encourue en prenant parti pour l'hérésie cathare, dit Don Vaissette (HGL T. III, p.352) . Peu de temps plus tard il sera l'intermédiaire entre Agnès, vicomtesse de Béziers et le roi de France. Et vers ce même temps, la croisade albigeoise semblant se terminer (ce ne fut qu'un apaisement cependant) Pierre d'Amelii vint en députation à Paris avec les évêques d'Albi et de Castres pour apporter au roi les serments de fidélité des habitants de cette dernière ville ainsi que la soumission des vicomtes de Béziers. Honorius III par une lettre qu'il lui adressa lui fit concession des dîmes acquises par son prédécesseur; et le roi Louis VIII lui cédait, moyennant un tribut, tous les biens de sa province ecclésiastique dont les nobles faydits locaux furent dépossédés après leur défaite suivant un acte de reconnaissance du prélat Amiel daté d'octobre 1226 (HGL, T. III, p.365).
Durant le carême de 1227 Pierre Amelii tint un synode provincial à Narbonne, dans lequel furent rédigés des statuts en 20 chapitres; on y remarque les peines encourues par les juifs en raison de taux d'usure exorbitants ainsi que contre les chrétiens qui étaient leurs emprunteurs ou qui fraternisaient avec eux. Chaque famille juive y est condamnée à payer, aux fêtes de Pâques, 6 deniers de melgueil. Il y est ordonné d'excommunier, tous les dimanches, les usuriers comme les incestueux ou les voleurs etc... On y défend de lever des tailles contre les clercs et on y institue ceux qui auront à rechercher les hérétiques et criminels publics. Il y est recommandé de se faire ordonner prêtres à ceux qui, par la ruse ou la force, envahissaient les biens de l'église, à ces laïcs qui, pour s'en assurer la possession, osaient se dire, se faire 'baptiser' archiprêtres, prévôts ou abbés.
Pierre Amiel se trouva en 1228 aux conférences tenues à Meaux puis Paris au sujet du Traité de Paix à établir entre le Comte de Toulouse et le Roi de France qui sera signé en 1229 (cf. Guillaume de Puylaurens, ch.39). Il sera aussi du nombre des chefs qui conduisirent les troupes pour l'expédition qu'allait faire en Orient l'empereur Frédéric II mais il ne s'est pas embarqué puisqu'il assiste en 1229 au synode que le Légat Romain de St Ange convoqua à Toulouse (HGL, T. III, p.382) pour y prendre les mesures adéquat contre les hérétiques; lesquelles aboutirent à l'établissement de l'Inquisition dans tout le pays.
Au sortir de ce synode, Amiel réitéra avec le jeune roi Louis IX par l'entremise de Guy de Lévis, l'accord qu'il avait passé avec son père concernant les biens confisqués aux hérétiques que le roi lui avait concédé; et toujours occupé par ce sujet, il prit en 1230 un nouvel acte par lequel les citoyens de Narbonne juraient au pape, en la personne de l'archevêque de Vienne, son légat, de défendre la religion catholique, de faire en conséquence la guerre aux hérétiques et à ceux qui les soutenaient.
Mais doutant que cet engagement pourtant solennel soit tenu par les narbonnais, il n'hésita pas à introduire les Frères Précheurs (Dominicains) à Narbonne dès 1231; il leur donna une maison, des terres et leur fit présent d'une bible enrichie de gloses. En 1232 il exigea même d'Aymeric, vicomte de Narbonne, un acte par lequel il se reconnaissait son vassal ! Dans l'assemblée qui fut tenue à ce sujet, Pierre Amiel confirma cependant toutes les coutumes municipales en place. Dans cet acte il est fait mention du "Capitole de Narbonne" gallo-romain qui était alors situé dans la partie de la ville soumise au vicomte, c'est donc qu'il en restait encore des reliefs.
Un débat eut lieu entre lui et les religieux d'Alet touchant aux revenus abbatiaux que Pierre n'hésitait pas à réclamer pour son propre chapitre cathédral, et donc au détriment de celui d'Alet; pour cela il alla même à Rome plaider sa cause devant le pape, lequel fit examiner la chose et régler sur place par son légat, l'archevêque de Vienne. Il voulut ensuite exiger des habitants de Narbonne un nouveau serment par lequel ils se soumettaient aux dispositions du concile de Béziers qui venait de s'achever, ce qui les souleva contre lui; il fut même chassé de la ville et de graves évènements s'en suivirent dans la cité en 1234. Il usa sans se démonter du droit d'excommunication et rentra dans sa ville en 1235. Ce retour bien que fait avec le consentement forcé du peuple, n'empêcha pourtant pas les Narbonnais furieux d'envahir le couvent des Frères Prêcheurs, comme le firent les toulousains chez eux et de les expulser même de la ville à leur tour.
Au zèle anti-hérétique, à l'empressement qu'il mit à défendre ses droits sacerdotaux, épiscopaux et seigneuriaux, il faut ajouter son ardeur guerrière. Il n'hésita pas à se porter en effet au secours du roi d'Aragon, Jacques Ier, occupé à combattre les Maures. On sait qu'il partit pour cela en 1238 pour l'expédition de Valence et, quand même incertain de son issue, il préféra faire son testament ! On l'a conservé (Gallia Christ. T. VI, c.68): on peut y lire la fortune nobiliaire d'un grand prélat de ce temps ! Pourtant il n'y "couche" aucun parent et il n'y est question d'aucun bien immeuble, foncier. Il dispose uniquement de ses biens mobiliers à destination surtout du chapitre (qui était alors à St Paul-Serge, la cathédrale St Just ne sera construite que plus tard), il fonde des chapelles et des messes pour le repos de son âme (et il en eut bien besoin !) lègue son argenterie à la cathédrale, ses livres aux "escholiers" qu'il entretenait comme cela se faisait, à l'Université de Paris et ses lits aux hôpitaux. A Valence il montrera un grand courage "et archiepiscopus Narbonensis strenue dimicavit" soit l'archevêque de Narbonne a combattu énergiquement, dit la Chronique d'Albéric. Et Valence fut bel et bien reprise; il revint sain et sauf à Narbonne, le roi d'Aragon reconnut ses services éminents par le don de plusieurs lieux castraux. Il échangera ces biens avec le même roi le 7 avril 1239 à Montpellier, ville aragonaise, contre des maisons dans cette ville, semble t-il.
En 1239 toujours, il donne une nouvelle preuve de son courage au service du roi de France cette fois, lorsque Raymond Trencavel le Jeune, Olivier de Termes et d'autres seigneurs audois ayant envahi Carcassonne, il accourut vers la Cité avec l'évêque de Toulouse, chacun à la tête de leurs gens d'armes; ils combattirent pour défendre les nouveaux droits acquis du roi sous les ordres du maréchal Guy de Lévis, ceci en 1240; ils parvinrent évidemment à rétablir "l'obéissance" au roi !
Vers ce temps encore il s'éleva une contestation entre Pierre Amiel et le vicomte Aymeric à propos du droit de battre monnaie et ce dernier, ayant appelé à son secours quelques troupes de catalans, força son adversaire à s'éloigner de Narbonne; exit Amiel à nouveau !
Peu de temps auparavant il s'était aussi attiré l'adversion de son propre chapitre en privant quelques chanoines de leurs bénéfices et en voulant contraindre les autres à administrer eux-mêmes leurs églises ! La contestation fut portée devant un arbitre neutre en la personne du prieur de Montpellier, lequel trancha en faveur.... des chanoines ! Mais, à la décharge d'Amiel, il est vrai que ces chanoines l'avaient bien cherché : dans deux lettres de 1241 ils lui faisaient des reproches sur sa conduite peu cléricale; dans ces lettres il était invité à ne pas confirmer l'évêque nouvellement élu de Béziers sans avoir consulté son chapitre; il faut dire qu'il y a bien longtemps déjà que ces élections n'étaient plus du ressort des églises concernées. Mais on a là un cas rare en ce temps d'un chef religieux élevé, censuré par ses inférieurs, c'est dire si le climat devait être tendu à l'archevêché ! Sans parler du vocabulaire employé, des termes bien sentis sans aucune ambiguïté et qui ne laissaient aucune interprétation possible. Voici en quels termes les chanoines ont vertement admonesté leur archevêque : il y est accusé de négliger les droits et devoirs épiscopaux, de passer sa vie à cheval au détriment de son propre corps et à la honte de ses diocésains, d'excommunier les gens pour mettre à prix son absolution, d'absoudre pareillement les hérétiques moyennant salaire, de recevoir les présents des juifs au détriment des chrétiens, de s'approprier les fruits (bénéfices) des diocèses vacants, de ne tenir aucun compte des anciens droits et (surtout) d'imposer des charges nouvelles, soit aux clercs soit aux églises de son diocèse, pour rendre sa table plus somptueuse, enfin d'affecter un langage hautain, insultant et quelquefois scandaleux... et alia quam plurima, ainsi que plusieurs autres griefs !!!
P. Amiel eut encore en 1243 l'occasion de donner des preuves de sa valeur.... guerrière en contribuant par sa personne comme par ses gens d'armes à faire le siège de Montségur durant l'hiver 1243-1244. On sait comment se termina cet ultime épisode de l'église cathare. Peu après il rédigea une lettre circulaire à ses évêques suffragants afin "d'exciter leur zèle pour l'œuvre salutaire de l'inquisition". Il écrivit aussi conjointement avec les autres autorités narbonnaises, au roi Louis IX sur l'irruption faite par les gens du bourg dans la maison des frères mineurs, qu'ils avaient chassés pour la convertir en maison d'accueil des hérétiques !
Un synode des trois provinces ecclésiastiques de Narbonne, Arles et Aix fut ensuite convoqué par lui et qu'il présida sans doute en 1244 (selon la Gallia Christ. et l'HGL). Il y fut question de la conduite inquisitoriale à tenir devant les hérétiques; des conclusions en 29 chapitres furent rédigées qui réglèrent le sort des condamnés comme la façon de procéder. "C'était plutôt une affaire de politique que de religion, et le parti qui voulait se séparer du reste de l'état par ses croyances était forcé d'y rentrer ou de se voir anéantir" c'est ce qu'affirme quand même le religieux bénédictin auteur de la biographie. Henri de Spade (Spondanus ad anu 1235) qui parle des peines déjà prévues alors et infligées, reconnaissait que tout cela respirait la plus grande sévérité, conforme du reste aux mœurs du temps : "Suntque valde severa, prout ferebat praxis ejus temporis", soit (ces peines) sont très sévères, conformément aux usages de ce temps.
L'année suivante, enfin, en 1245, Amiel fit un nouveau testament; il contient notamment un legs au pape Innocent IV par lequel notre prélat lui donne son blé, son orge, ses porcs (!) et ce pape en demandera effectivement l'exécution quelques temps plus tard à son successeur Guillaume de la Broüe car Pierre Amiel mourut à Narbonne le 20 mai 1245 selon les nécrologes de la ville comme ceux de Béziers et du monastère de Cassan, alors qu'il se préparait à se rendre à un concile à Lyon. Sa sépulture fut faite dans l'église du monastère de Cassan (Hérault). Bon débarras finalement, non ?
(d'après "Histoire Littéraire de la France..." Congrégation de St Maur continuée par les membres de l'Institut de France ensuite. T. XVIII; Paris, Didot, 1835; le contenu de la lettre de reproches de 1241 est tirée de "Le dernier des Trencavel..." Vol. II L. XVI, p.223, H. Reboul; Paris, Tenon, 1835).