LES AMIEL IMMIGRANTS en AFRIQUE DU SUD :
- Il y eut des protestants qui n'hésitèrent pas à faire un voyage risqué très loin de l'Europe pour fuir l'intolérance religieuse des débuts de la Réforme ou des suites de la révocation de l'Edit de Tolérance, dit Edit de Nantes, par Louis XIV. Cette 'fuite' est à l'origine du mot 'refuge' désignant les pays dans lesquels ils trouvèrent l'abri, et du mot 'réfugiés' par lesquels ils se désignèrent, mot devenu commun depuis pour toute population se résignant à quitter son pays d'origine pour un abri. Par la voie des Pays-Bas et de ses navigateurs certains se sont embarqués pour l'Afrique du Sud. A cette époque-là il fallait beaucoup d'audace, le voyage durait plusieurs mois, les conditions de vie à bord étaient très éprouvantes, beaucoup mouraient bien avant d'arriver à destination. C'est dans ce cadre que le Wapen Van Alkmaar avec notamment quarante huguenots à bord quitta Texel (Pays-Bas) le 18 ou 27 Juillet 1688. On sait que trente-sept embarqués moururent, (mais tous n'étaient pas parmi ces huguenots) et cent-quatre passagers arrivèrent à Table Bay, au Cap, tout en bas du globe terrestre, le 27 Janvier 1689, six mois après leur départ ! Parmi eux on trouve le nom de Mathieu Amiel, du Luc en Provence, ainsi que celui de Suzanne Aubanel-Amiel, sa femme, épousée en 1679, qui elle était native de Tourettes, près de Draguignan. Mathieu Amiel fut intégré dans l'église wallonne d'Amsterdam grâce à laquelle il put entreprendre ce très long voyage; il était le fils du cardeur de laine et tisserand lainier Jean Amiel et de son épouse Isabeau de Gras(s)e; et ce père fut lui-même le fils d'un autre Jean Amiel mort en 1678 à l'âge de 56ans. On sait enfin que Mathieu eut deux fils de son (1er mariage) avec Suzanne: ils vivent avec lui au Cap en 1690; l'un des deux nommé François Amiel est noté toujours au Cap en 1706, l'autre parait se nommer aussi Mathieu. Ils ont avec d'autres développé là-bas la culture de la vigne qui s'enracinera avec eux; ces pionniers ont laissé quelques traces de leur installation.
(=> "The Huguenots of South Africa 1688-1988" Tafelberg Publishers Limited Cape Town 1988); "French speakers at The Cap in the first hundred years of Dutch East India Company Rule : The European Background" M. Boucher University of South Africa 1981).
- Un Amiel est encore remarqué comme négociant au Cap en 1784. Il s'agit peut-être d'un descendant (ayant réussi dans les affaires, négoce de vin à l'export ?) des Amiel du Luc ci-dessus. On connait son existence par sa souscription à un exemplaire des Lois et Constitutions des Colonies Françaises de l'Amérique, publié cette année-là.
Les AMIEL Juifs au MAROC :
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Les juifs du Maroc :
La grande majorité des juifs est arrivée au Maroc à compter de 1492, fuyant l'Espagne et Isabelle la Catholique qui n'aimait pas vraiment ce peuple qui avait tué le Christ. Mais des communautés étaient déjà là, avant même la conquête arabe. Vivant parmi les musulmans comme ils le firent parmi les tribus berbères (récemment j'ai pu lire un article marocain qui parlait du souvenir d'une "tribu Amiel" juive) ou les romains il y a bien longtemps, ils participèrent en Espagne au rayonnement d'El Andalous. Le juif Maïmonide fut l'élève du musulman Averroès pour apprendre la médecine à Cordoue au VIIème S.; il sera mèdecin à la cour de Saladin et tentera la réconciliation entre religion et science. Il est aussi l'auteur d'une pharmacopée qui sera en usage jusqu'au XIXème S. ! En ce temps-là les juifs circulaient librement avec le Maroc. Mais en 1492 tout changera donc et le Maroc sera leur refuge. Ils débarquent à Salé, ce seront plutôt des sépharades et ils vivront en ghettos ouverts ou fermés suivant les époques et la disposition des dynasties musulmanes régnantes jusqu'au XIXème S. Fin XIX- début XXème S. il y eut des émigrations vers l'Amérique du nord (à New-York notamment), comme vers l'Amérique du sud (Pérou, Argentine) et bien entendu surtout avant et après la 2ème Guerre Mondiale. Au Maroc, le retour de la dynastie locale après les protectorats d'avant guerre joint à l'arabisation de la société portant des attaques antisémites, incitèrent les derniers à partir vers Israël. Et en nombre important; de 400.000 membres la communauté ne compta plus rapidement que quelques centaines de familles après 1961, après le décès du roi Mohamed V. Lors de la guerre israélo-arabe de 1967 beaucoup de ceux qui étaient resté émigrèrent à leur tour aux Usa, au Canada et en France (des Amiel de l'île de la Réunion sont originaires du Maroc).
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Les Amiel du Maroc :
Un nombre conséquent d'Amiel juifs sont connus surtout au XIXème S. Une famille en particulier est représentative de cette présence forte et je me réfère pour cela ici au témoignage instructif de Joseph Amiel, né en 1949 à El Jadida (ex Mazagan) dont on retrouvera dans la liste finale plusieurs ascendants. Il sera en 1964, alors qu'il n'avait que 15ans, avec ses parents, parmi la dernière vague d'émigrants de ce pays, les juifs étant désormais très peu nombreux à y vivre encore. Son père Pinhas était commerçant et sa famille descendait des Amiel qui furent présents à la construction de la nouvelle ville d'El Jadida, avec quelques autres de même origine pour reconstituer le commerce dans cette ville portuaire. Son arrière grand-père Yahya créa la 1ère synagogue de la ville dans la cité portugaise (elle existe encore et est toujours nommée Synagogue Amiel). Et Joseph eut une très grande famille : ses oncles Salomon Aaron et Yahya Amiel, son cousin germain Jacques, aussi Luna et Aimée, tous nommés Amiel bien sûr; bien d'autres encore qui avaient fondé dit-il leurs propres familles. Son cousin Jacques était pharmacien à El Jadida après avoir fait ses études universitaires en France. Enfin il ajoute ceci :
J'ai appris par votre ouvrage sur les anciens consulats de Mazagan, qu'il y avait d'autres Amiel qui travaillaient avec les consulats européens comme Simon Amiel, interprète du vice-consul de France, Abraham Amiel, courtier du vice-consul du Portugal, sans oublier un certain Joseph Amiel qui fut membre de la commission municipale mixte et président de l'association dite du Cercle de l'Union.
Au début des années 1960 la conjoncture sociale et politique jointe aux difficultés économiques firent que l'émigration finale fut inévitable. Et Joseph estime que ce sont surtout les éléments économiques et commerciaux qui furent décisifs : A El Jadida, le secteur des œufs à l'exportation (dont je parle d'ailleurs ci-après), activité de son père, fut le plus touché, car c'est le moment où le marché commun européen se développe avec l'entrée de la France.
(=> articles de M. Jmahri publiés dans
Mazagan24. com du 11/01/2016 & autre "A la recherche des Amiel" du 8/04/2016).
- L'annuaire du commerce de Casablanca donne trois noms d'Amiel juifs des derniers temps dans ce pays:
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Bensiman Amiel, David et Yahia qui sont au marché aux œufs en 1939. Voilà un commerce international qui dure depuis au moins 130 ans puisque il est certain qu'il existait déjà vers 1880 et qu'encore de nos jours "D. Amiel S.A." continue ce genre d'activité originale toujours à Casablanca. Il y a un siècle des caisses d'œufs très bien emballés partaient depuis Mazagan pour être acheminés bien loin, à Londres par exemple, pour la Maison H. Bottin. L'Encyclopédie du Maroc (1948, p.450) indique que ce commerce spécial fut la "branche la plus importante du port de Mazagan..., ces œufs étaient connus sur tous les marchés du monde.
Mais bien avant cette époque bénie pour le commerce, il y a lieu de citer :
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Itshak Amiel : Fils de Yeoushoua, ce personnage fut rabbin et kabbaliste de Meknès dans la 2ème moitié du XVIIIème S.
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Shlomo Amiel : Rabbin et notaire juif à Fès dans la 2ème moitié du XIXème S.
Il y a lieu de citer aussi un véritable personnage local en la personne de :
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Rabbi Amiel Bensimon: dit "le doux"; il était une légende de Fès au début du XXème S. Il connaissait disait-on toutes les théologies du monde et, contrairement à ses collègues, il était partisan de la dispute entre religions plutôt que du dialogue entre elles ! Il disait par ex. "A chacun sa Révélation, sa Vérité et son Dieu. Il ne sert à rien de chercher à voiler les divergences et les tensions par un dialogue de sourds. Plutôt les exacerber par la dispute...." (cf. "Asher le devin et autres contes de Fès" p.216, Ami Bouganim, A. Michel Ed. 2010). Plusieurs histoires le concernant sont racontées dans ce livre.
- Parmi les nobles figures de Mazagan (El Jadida de nos jours) figurent les Amiel suivants :
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Salomon Amiel : Riche commerçant de la communauté juive d'El Jadida, colonie portugaise reconquise par le Maroc seulement en 1768, après deux siècles d'occupation. La communauté juive qui avait prospéré sous les portugais se reforma après la reconstruction de la ville détruite au moment de sa libération. Salomon Amiel fut le président de ce renouveau juif dès la fin du XVIIIème S. et ses descendants lui succédèrent à ce poste en une sorte de dynastie.
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Yahia Amiel dit Zréouel à cause de ses yeux bleus; il fut un ami personnel du sultan Moulay Hassan Ier, sultan de 1873 à 1894. Il obtint de lui la suppression de la bastonnade (sorte de réjouissance autant que peine de justice musulmane). C'était un grand négociant et notable de la communauté de la ville. Il fut président de la communauté juive de Mazagan à la fin du XIXème S. et fonda une véritable dynastie : son fils Abraham lui succéda en 1932 puis son petit-fils nommé comme lui Yahia et son arrière- petit-fils Salomon ont été eux aussi à la tête de cette communauté jusqu'aux années 1950 :
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Yahia Amiel II : Président donc de la communauté juive de Mazagan vers la fin des années 1930; on sait de lui qu'en septembre 1939, au début de la 2ème guerre mondiale, il demanda à ses coreligionnaires de se porter volontaires pour combattre aux côtés des soldats français pour défendre la France et il donna pour cela lui-même l'exemple malgré son âge avancé : "Nous saurons défendre la France avec motivation et conviction; en défendant la France nous défendrons notre religion et nos coutumes que la France généreuse et libérale a toujours respectées". Mais les autorités françaises refusèrent de recruter de tels volontaires de peur d'avoir, après la fin du conflit, à leur accorder la nationalité française !
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Salomon Amiel : Fils du précédent; lui aussi fut président de la communauté juive de la ville à partir de 1944 et dans les années 1950.
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Joseph Amiel fut lui un fin lettré qui entretint une correspondance suivie avec le (futur) roi d'Espagne Alphonse XIII (roi entre 1902 et 1931). Auparavant ce personnage fut le traducteur du Vice-Consul d'Angleterre à Casablanca puis Tanger dans la 2ème moitié du XIXème S.; cette protection anglaise le soustrayant à la justice marocaine lui conféra dans l'ancien Maroc une position privilégiée dont il semble avoir abusé. Une plainte fut déposée contre lui pour avoir provoqué l'arrestation et la flagellation de huit femmes juives de la ville qu'il accusa d'avoir séduit et dévoyé ses fils. Mais ces jeunes hommes lui avaient simplement désobéi en restant très tard la nuit chez ces dames très accueillantes. L'affaire prit mauvaise tournure par l'intervention du consul américain de Tanger, désireux pour sa part d'accroître par là son influence auprès de la communauté juive; il en appela directement au ministre marocain de la justice malgré qu'il se soit agi en l'espèce d'une affaire interne juive et qu'aucun de ses protégés américains ne soit concerné; et son intervention fit son effet : les femmes furent libérées. Celles-ci se retournèrent alors contre Joseph Amiel afin d'obtenir quelque dédommagement. Il refusa de verser quoi que ce soit, arguant que l'arrestation de ces femmes avait été ordonnée par le gouverneur et qu'il en était le seul responsable. Ce dernier qui avait plutôt agi ainsi pour complaire à l'influent "drogman" (interprète) se vengea en ordonnant sa propre arrestation. Mais pressentant la chose Joseph Amiel avait pris les devants en quittant rapidement le pays pour trouver refuge à Jérusalem en 1883.
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Hayim & Mimoun Amiel : Riches marchands de Mazagan qui, fortune faite, partirent s'installer à Jérusalem où ils participèrent à la création en 1860 du Comité de la Communauté Maghrébine; et cette association parvint à s'émanciper de la puissante communauté sépharade accusée de discriminer les immigrants du Maghreb. Mimoun est ensuite allé à Jaffa où il joua un rôle éminent dans l'aide aux "haloutsim" (pionniers) venus d'Europe.
(=> pour ce qui concerne Mazagan : article de Joseph Benshimon in "La voix des Communautés" ~1950 et pour les compléments "La saga des familles: Les juifs du Maroc et leurs noms" J. Toledano, Stavit, Tel-Aviv Isr. 1983; "Les noms des juifs du Maroc" A. Laredo, Madrid, Esp. 1978; "Dictionnaire biographique du monde juif sépharade et méditerranéen" J. Levi & all. Ed. Elysée, Montréal, Can. 2000).
SCHLOMO AMIEL, donateur marocain :
Schlomo Amiel fut un grand propriétaire terrien de la région de Doukala et le père de Henri Aaron Amiel de Casablanca; il a donné au cours du XXème S. la maison et la tombe d'un marabout juif, véritable saint vénéré, celle de Rabbi Abraham Moul Niss, arrivé en 1840 à Azemour. Véritable sanctuaire, ce lieu fit l'objet de pèlerinages pendant très longtemps; situé sur une belle place dans un amphithéâtre de constructions, c'est une grande bâtisse bien entretenue dont le rez-de-chaussée qui constitue une synagogue jointe au tombeau, est creusé en partie dans le rocher sur lequel toutes les maisons voisines s'accrochent.
SIMON AMIEL Chanteur populaire tunisien :
Chanteur populaire juif tunisien d'origine égyptienne du XXème S.; il est de tradition judéo-arabe et de l'exil en Afrique du nord.
Les AMIEL en ALGERIE :
L'Algérie conquise dans les années 1830 devint un département français. Le territoire colonisé était vierge et à exploiter, les terres devaient être mises en valeur et les colons affluèrent de partout, beaucoup de France mais aussi d'Espagne ou d'Italie; ils étaient originaires de régions européennes souvent déshéritées. Nonobstant les juifs qui étaient là depuis très longtemps, la France envoya des colons. Un dépouillement des archives d'état-civil des départs pour l'Algérie Française (2ème moitié du XIXème S) fait apparaitre trois Amiel ariégeois, Jean-Baptiste, Jean-Paul et Joseph; un du Gard, Victor; deux de la Haute-Garonne, François & Jean; et six du Tarn, Baptiste, 2 François, Louis, Marie-Anne (née Fabre) et Pierre; une femme Amiel du Vaucluse, née Julien veuve de Louis Amiel. On y trouve aussi cinq Amielh d'une même famille ariégeoise Amielh-Marty, 2 autres des Alpes de Haute-Provence (Joseph & Alphonse) et 2 des Bouches-du-Rhône (Germaine & Léonie-Madeleine). Il y a enfin 4 épouses dont le nom de jeune fille était Amiel.
Des AMIEL aux AMOYAL en Afrique du Nord :
Même s'il n'est pas certain que le patronyme Moyal, Amoyal ait quelque accointance avec Amiel (certains les font venir d'une localité espagnole homonyme) par contre il est vérifié que les changements vocaliques des voyelles sont très fréquents dans ces régions de méditerranée méridionale chez les juifs. Il n'est pas si inexact de dire que les patronymes comme Ammouial, Benmouyal, Benmoyal, Mouel, Mouial, par Amoiel qui les réunit tous, sont très apparentés avec Amiel, tous partageant avec lui la même origine biblique.
ELIE AMIEL en EGYPTE :
L'histoire des juifs en Egypte remonte au moins au VIIème S. avant notre ère, si l'on excepte leurs séjours encore antérieurs. Ils y furent en nombre pendant des siècles durant notre ère. En 1954 ils étaient encore ~50.000 mais un demi-siècle plus tard ils ne sont plus qu'une centaine. En 1970 Elie Amiel qui était l'un des membres de cette communauté fonda l'Amicale d'Alexandrie; il organisa des réunions mensuelles des juifs de la plus grande ville égyptienne, la plus commerçante aussi alors que la suite ininterrompue d'évènements faisait fondre la communauté depuis le départ de la moitié de ses coreligionnaires après un grave crise en 1954, par suite aussi des conséquences régionales de la création de l'Etat d'Israël dont la fameuse guerre des Six Jours de 1967. Sans doute de nos jours sont-ils moins d'une centaine.